La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Focus -151-du-theatre

Gloria Paris

Gloria Paris - Critique sortie Théâtre

Publié le 10 octobre 2007

L’espace de contamination des genres

En mettant en scène Les Amoureux, Gloria Paris donne corps aux glissements naturels contenus dans le théâtre goldonien : de la comédie vers la tragédie ; de la tragédie vers la comédie.

Les Amoureux campe deux jeunes fiancés excessifs et querelleurs. Est-ce une pièce sur l’adolescence ?

Gloria Paris : Oui, une pièce sur l’adolescence et la façon qu’ont les jeunes gens d’être susceptibles, narcissiques, de ne regarder qu’eux-mêmes dans le regard de l’autre, de ne pas vraiment être capables d’entrer en relation avec qui que ce soit et donc de se transformer, de construire une famille. J’ai pris le parti de représenter ces deux amoureux en fashion victims d’aujourd’hui. Car, comme tous les adolescents, ils sont bloqués dans un schéma identitaire, sont soumis à des instincts grégaires qui les poussent, pour affirmer leur volonté d’être unique, à se comporter et se vêtir tous de la même façon. Je n’ai aucun mépris pour cette attitude-là. Mon idée n’est pas de les ridiculiser, mais simplement, comme Goldoni, de creuser, en les regardant à la loupe, les comportements humains. 

« On ne peut pas désincarner Goldoni. »

Quelle différence entre Goldoni et Marivaux, auteur dont vous avez mis en scène La fausse Suivante ?

G. P. : Je dirais que la langue de Marivaux est beaucoup plus écrite, plus littéraire, que celle de Goldoni. Pour l’apprivoiser, il faut entrer à l’intérieur et abandonner la pensée, car elle contient déjà de la pensée. Beaucoup de pièces de Goldoni ont, elles, été écrites en dialectes régionaux, des langues du cœur, de l’affect, de l’irrationnel, qui demandent aux comédiens d’aller chercher le concret du jeu. On ne peut pas désincarner Goldoni. La désincarnation ne fonctionne que lorsque l’on a en face de soi des acteurs incarnés. Je crois qu’il faut aimer Goldoni pour ce qu’il est : un pur exemple de la culture italienne, qui fait se côtoyer intimement la tragédie et la comédie. Il existe chez cet auteur, comme chez Fellini ou même Pasolini, un espace de cohabitation, de contamination des genres, un glissement permanent des rires aux pleurs et des pleurs aux rires.


Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat


Les Amoureux, de Carlo Goldoni ; mise en scène de Gloria Paris. Du 11 au 24 janvier 2008.

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