Génération(s), pour et avec les jeunes, rencontre avec Fériel Bakouri

Comment sont nés les temps forts Génération(s) ?

Fériel Bakouri : Ces temps forts font partie de l’essence même de mon projet pour la scène nationale de Cergy-Pontoise qui comprend trois axes : arts et paysages, arts et humanités et un axe jeunesse qui est celui qui nous intéresse avec Génération(s). Il se trouve que le Val-d’Oise est le département le plus jeune de France et que 40 % de la population de Cergy-Pontoise a moins de 30 ans. Selon moi, il faut que les lieux artistiques et culturels incluent les jeunes autrement que par la seule sortie scolaire, même si celle-ci est très importante. Je pense que les lieux culturels doivent être à la fois des lieux de fête et de sens pour les jeunes, sans que cela passe systématiquement par les parents ou par les professeurs.

« Je pense que les lieux culturels doivent être à la fois des lieux de fête et de sens pour les jeunes. »

Quelles sont les caractéristiques de ces temps forts ?

F.B. : Ma volonté, disons pour les 16-30 ans, est de créer une programmation qui leur soit adressée mais qui parte aussi d’eux. C’est sur le principe de ce double mouvement que nous avons construit avec la secrétaire générale Chloé Guilbert les temps forts Génération(s) qui ont lieu trois fois par an. J’ai envie que les jeunes entrent dans notre scène nationale comme ils le feraient dans une discothèque. Il y a parfois quelque chose de trop sérieux dans notre rapport à la culture. Mon idée est de leur proposer à la fois des spectacles qui engagent une réflexion sur les grands sujets qui les préoccupent mais aussi des moments de fête. En parallèle, nous proposons à des associations locales de participer à ces temps forts avec leurs pratiques diverses comme le slam ou les concours d’éloquence. À cela s’ajoute des projets participatifs. Nous avons par exemple organisé une Listening Party avec la chorégraphe islandaise Ásrún Magnúsdóttir et trente adolescents du Val-d’Oise qui ont investi le plateau du Théâtre 95 au son de leurs tubes préférés. Tous nous ont exprimé à quel point cette expérience les avait transformés. Finalement, si j’avais quelques appréhensions en mettant ce projet en place, force est de constater que ces temps forts ont été un très grand succès dès les premières éditions.

Pourquoi avoir appelé ces temps dédiés à la jeunesse Génération(s) ?

F.B. : Parce que je ne voulais pas cliver les générations. Si ces temps forts sont pensés avant tout pour la jeunesse, il est bien évident que les projets que nous présentons peuvent être vus à tout âge.

Quelles sont les particularités des temps forts de cette saison ?

F.B. : Leur particularité dépend des artistes. Le fil rouge de cette saison est confié à la compagnie valdoisienne Mazelfreten, qui unit danses électro et hip-hop. Nous accueillons le chorégraphe londonien Botis Seva, c’est un événement car c’est la première fois qu’il vient en France. Le collectif espagnol La Tristura propose une œuvre très forte et inédite, Future Lovers, qui dépeint une jeunesse en prise avec la construction de son identité. J’aime aussi beaucoup le projet de Julie Bérès qui, un peu à contre-courant, a interrogé pour La Tendresse de jeunes hommes sur la construction de leur masculinité à l’heure où l’on dénonce à juste titre les différentes violences faites aux femmes. Et puis nous faisons aussi un clin d’œil aux Jeux Olympiques en invitant le street basket et le breakdance qui sont des pratiques sportives locales. Ce croisement art et sport est très important pour faire venir dans nos lieux des jeunes qui ne sont pas acquis à la scène nationale.

Propos recueillis par Delphine Baffour