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"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Focus -213-Orchestre National d’Ile~de~France

Entretien Enrique Mazzola

Entretien Enrique Mazzola - Critique sortie Classique / Opéra Alfortville Orchestre national d’Ile-de-France
Photo Enrique Mazzola crédit Martin Sigmund

Publié le 24 septembre 2013 - N° 213

Défendre la tradition symphonique française

Après sa première saison en qualité de directeur musical de l’ONDIF, le chef italien évoque ses projets pour la formation francilienne.

« Aujourd’hui, les orchestres ont presque tous le même but : jouer les grandes symphonies de Mahler et Bruckner. C’est un effet de la mondialisation. »

Que retenez-vous de votre première saison à la tête de l’ONDIF ?

Enrique Mazzola : Ce fut une saison particulièrement intense. La rencontre entre un orchestre et son nouveau directeur musical est un moment toujours très fort, même si j’avais déjà noué par le passé un lien étroit avec l’ONDIF. Au bout d’une saison, je commence à connaître la personnalité de chaque musicien, et j’arrive donc à mieux communiquer avec l’Orchestre. Je suis par ailleurs impressionné par la flexibilité des musiciens, la vitesse à laquelle l’Orchestre s’adapte à une salle de concert, du fait de leurs années passées à sillonner l’Ile-de-France.

Les musiciens d’orchestre français n’ont pas toujours bonne réputation… Qu’en pensez-vous ?

E.M. : Il y a une sorte de légende sur les orchestres français. Je connais d’ailleurs beaucoup de jeunes chefs qui n’osent pas faire leur début ici, de peur de devoir débattre avec les musiciens. C’est vrai que parfois, dans certaines phalanges, des musiciens peuvent créer des difficultés, mais cela stimule la répétition et empêche la routine ! J’aime être provoqué, j’ai une âme latine… Ce que j’apprécie avec l’Ondif, c’est qu’il y a à la fois une atmosphère de travail sérieuse et une joie, une vraie envie de jouer.

Comment travaillez-vous avec l’Orchestre ?

E.M. : Je suis deux directions. Tout d’abord, je communique à l’Orchestre mes idées, mon expérience. Puis je m’imprègne du jeu des musiciens, de l’héritage de l’Ondif. Aujourd’hui, les orchestres ont presque tous le même but : jouer les grandes symphonies de Mahler et Bruckner. C’est un effet de la mondialisation. Avec l’Ondif, je souhaite au contraire remettre à l’honneur le répertoire français, qui est trop souvent ignoré. Il y a une vraie tradition de l’orchestre français, avec une sonorité particulière, que ce soit dans la délicatesse des cordes ou le vibrato des cors. Il ne faut pas que cela devienne une langue perdue, en se concentrant uniquement sur le romantisme allemand.

Comment avez-vous conçu cette saison 2013-14 ?

E.M. : En 2014, nous ouvrons les festivités des 40 ans de l’Orchestre par un concert sur le thème du voyage, avec en soliste le baryton Markus Werba, qui a chanté la saison dernière le rôle de Don Giovanni au Théâtre des Champs-Elysées. Tout au long de cette année, nous donnerons de courtes pièces de musique contemporaine, de Saariaho à Takemitsu. Par ailleurs, il me semble essentiel de tisser des liens avec les autres musiques. Nous accueillerons ainsi cette saison un joueur de sarod (instrument à cordes pincées indien) qui improvisera avec les musiciens ! Il faut bien sûr être très prudent avec ces projets, et je suis contre le mauvais crossover, où un rocker peut par exemple être accompagné d’un pauvre orchestre à cordes… En parallèle, nous continuons notre cycle des symphonies de Tchaïkovski et des concertos pour piano de Beethoven, avec Cédric Tiberghien. Enfin, nous entamons au Théâtre des Champs-Elysées un cycle Rossini. J’aurais trouvé regrettable de ne pas pouvoir transmettre à l’Orchestre mon expérience de l’opéra et en particulier du bel canto.

Quelle place l’ONDIF aura-t-il dans la future Philharmonie de Paris ?

E.M. : Nous aurons une collaboration plus étroite avec la Philharmonie de Paris, où nous serons orchestre associé, ce qui n’est le cas aujourd’hui avec la Salle Pleyel, où nous sommes locataires. La Philharmonie se construit sur un territoire que nous connaissons bien. Nous aurons peut-être moins de difficultés que d’autres orchestres parisiens à y faire venir nos spectateurs, qui lors de nos concerts à Paris sont pour moitié franciliens.

Sur scène, vous portez toujours sur vous un accessoire de couleur rouge, lunettes, écharpe… Pourquoi ?

E.M. : Je suis presque né avec des lunettes rouges ! J’aime cette couleur, qui apporte de la lumière. Ce n’est pas une quelconque affiliation politique ! Lors du dernier Festival de Glyndebourne, où je dirigeais Don Pasquale de Donizetti, les musiciens du Philharmonique de Londres ont tous porté, pour la dernière représentation, un accessoire rouge : des chaussettes, des lunettes, des boucles d’oreilles… Ils avaient bien compris l’esprit Mazzola !

 

Propos recueillis par Antoine Pecqueur

 

 

Orchestre national d’Ile-de-France, 19 rue des Ecoles, 94140 Alfortville. Tél : 01 41 79 03 40.

www.orchestre-ile.com

 

A propos de l'événement

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19 rue des Ecoles, 94140 Alfortville

Tél : 01 41 79 03 40. www.orchestre-ile.com
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