Les machines de l’illusion
Les instruments multimédias, conçus pour le [...]
Focus -293-La Muse en Circuit crée Erreurs salvatrices
Par le jeu et par la voix, le comédien est doublement présent dans Erreurs salvatrices, à la fois au cœur de la scène et au cœur du son.
Un corps, un visage, une voix. Ces trois modes par lesquels s’exprime le comédien, tantôt s’assemblent, se décalquent l’une sur l’autre, tantôt se désarticulent et se démultiplient. À ce jeu, Denis Lavant excelle. Fasciné par le mime Marceau, ébloui par Les Enfants du paradis, il impose son langage corporel sur scène, auprès de Matthias Langhoff ou Bernard Sobel par exemple, mais aussi, de façon extraordinaire, au cinéma dans Les Amants du Pont-Neuf de Leos Carax en 1991.
Une expression démultipliée
Pour Erreurs salvatrices, Wilfried Wendling dit envisager la voix du comédien sous « quatre dimensions », parcourant tout le spectre de la présence à l’absence du corps. C’est un exercice auquel Denis Lavant s’est souvent prêté, en incarnant par sa seule voix les mots des poètes, ces mots qui se prolongent au-delà des mots : parmi beaucoup d’autres, Rimbaud, Mallarmé, Beckett. Jusqu’à se pencher, dans La Dernière Bande, mise en scène il y a quelques années par Jacques Osinski à l’Athénée, sur sa propre voix, enregistrée, comme revenue du passé, au moment d’y inscrire la dernière couche du palimpseste. Ainsi la voix s’effeuille ou se recouvre. Ainsi fait le visage. Dans Holy Motors (2012), son dernier film avec Leos Carax, Denis Lavant va de travestissement en travestissement, jusqu’à se retrouver face à lui-même. Impossible de ne pas y voir le portrait même de l’acteur.
Jean-Guillaume Lebrun