Tout un homme
Jean-Paul Wenzel met en scène le texte qu’il [...]
Focus -202-Maison de la Musique de Nanterre
Dominique Laulanné est directeur artistique de la Maison de la musique de Nanterre. Il coordonne l’escale algérienne de la saison 2012-2013.
Pourquoi cette escale algérienne à Nanterre ?
Dominique Laulanné : S’il y a une ville algérienne en France, c’est bien Nanterre. L’histoire du FLN et de l’indépendance de l’Algérie ainsi que des pages entières de l’histoire de l’immigration sont passées par là. Se pencher sur les richesses culturelles de l’Algérie, qu’on retrouve en grande partie avec les artistes issus de l’immigration, semble donc naturel. Ce sont ces richesses, notamment musicales, que nous souhaitons partager avec les habitants, car elles contribuent à donner un sens à l’histoire française des quarante dernières années. Cette mémoire collective est à la fois celle de la France et celle des Algériens. Nous avons voulu montrer ce patrimoine méconnu, sous-estimé, qui se montre davantage dans les fêtes « communautaires » que dans les salles de la République.
Pourquoi investir les cafés avec l’opération « Scopitones dans les bars » ?
D. L. : Des cafés de Belleville à ceux de Barbès, les scopitones (clips des années 60 et 70) ont animé les soirées et alimenté la nostalgie du pays. Des centaines de clips ont été produits sur les artistes maghrébins et abondamment diffusés, notamment dans les bars kabyles. Retrouvés un peu par hasard par la productrice Madame Davis-Boyer et des passionnés, quelques scopitones ont fait l’objet d’un montage. Nous les présentons dans les bars de Nanterre, quarante ans plus tard. Comme un voyage dans le temps, on va réinvestir quelques bars, pour discuter, évoquer le passé, les bons et les mauvais souvenirs, et inviter des musiciens à venir jouer après la projection. Il y a là une dimension culturelle et sociétale très forte : l’idée, c’est de rassembler. La musique crée du lien ; elle devient prétexte à partager des choses ensemble en dépassant le cloisonnement des genres, des goûts et des pratiques.
Dans quel but ?
D. L. : Pour donner du sens et créer de l’identité. Se contenter d’inviter des vedettes commerciales ne permet pas de cultiver la culture. Cette escale a pour but de mettre en relation des personnes : c’est à cela que doivent s’employer la culture et les arts. C’est pour cela que cette opération compte autant de ramifications. On va aller dans les foyers Adoma (ex Sonacotra) où souvent, vieillissent, seuls, des Chibanis à la retraite. On va participer à l’aventure de l’écomusée des Caribous, ce quartier de Nanterre qui doit être détruit. Rabah Mezouane va animer plusieurs conférences musicales sur les thèmes de l’exil, des voix de femmes, de la chanson engagée, du football. On est à la fois dans la musique et au-delà de la musique. C’est exactement ce que j’essaie de faire à la Maison de la musique : de la musique partout et pour tous, dans un théâtre qui n’est pas seulement l’endroit où on déroule une programmation, mais le lieu d’une pratique collective, pour que le théâtre soit le lieu des enjeux collectifs et non pas celui des solitudes et des égoïsmes.
Propos recueillis par Catherine Robert
Jean-Paul Wenzel met en scène le texte qu’il [...]