La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

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Christine Berg

Christine Berg - Critique sortie Théâtre

Publié le 10 janvier 2008

Le politique, le comique et l’obscène

Christine Berg met en scène Shitz de Hanokh Levin, une farce familiale et politique que le dramaturge israélien, disparu en 1999, a écrite en réaction à la guerre du Kippour.

L’écriture de Levin connaît un succès croissant. Comment l’expliquer ?

Christine Berg :
Elle est sans doute due à la très grande originalité de ses pièces dans notre paysage théâtral. Car je ne crois pas qu’il existe un auteur français qui, comme lui, écrive de véritables comédies politiques satiriques. Hanokh Levin possédait une qualité d’écriture rare, ainsi qu’un champ d’expression extrêmement large. Il parvenait à inscrire ses fables dans le contexte social et politique israélien tout en s’adressant à tous les pays en guerre, à tous ceux qui, d’une façon ou d’une autre, profitent ou pâtissent des conflits. C’est la marque des grands auteurs que de faire preuve de cette hauteur de vue, de transcender le particulier pour tendre à l’universel.
 
Comment caractériser le mélange d’humour et de noirceur de la plupart de ses pièces ?

C. B. :
Il faut d’abord dire que son œuvre est très diverse. Mais il est vrai que la plupart de ses textes conjuguent une forme d’humour très corrosif à un sens prononcé du tragique et de la noirceur. Son univers est à la fois totalement désespéré et radicalement drôle. Il maniait en effet une forme de comique résolument décapant et volontiers excessif, qui peut aller jusqu’à l’obscène. Pour autant, il ne se laissait jamais aller à la vulgarité, car il ne restait jamais à la surface des choses. Il s’agit d’un auteur d’une grande profondeur, qui développe une vraie pensée sur le monde, une vraie philosophie de l’existence. Les pièces de Hanokh Levin nous font sans arrêt passer de la crudité à la spiritualité. C’est également cette distorsion-là qui crée un type d’humour tout à fait singulier.
 
« Les pièces de Hanokh Levin nous font sans arrêt passer de la crudité à la spiritualité. »
 
Quel regard portez-vous sur la pensée politique de Hanokh Levin ?

C. B. :
Elle est d’une lucidité implacable. Elle révèle des personnages cupides, sournois, égoïstes, des personnages sans aucune compassion pour leur prochain. Mais dans le même temps et assez étrangement, elle parvient à rendre l’être humain touchant, aimable, à dévoiler un endroit de clarté, une lueur d’espoir. Car cette pensée n’est ni manichéenne ni complaisante. Les conclusions qu’elle nous amène à tirer sur l’homme et la société sont sans appel et pourtant, elle révèle également une forme de tendresse : une tendresse que Hanokh Levin ressentait, malgré tout, pour ses semblables.
 
Propos recueillis par Manuel Piolat Soleymat


Shitz, de Hanokh Levin ; mise en scène de Christine Berg ; traduction de Laurence Sendrowicz. Les 25 et 26 janvier à 20h30 à la Grange Dîmière de Fresnes.

A propos de l'événement



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