La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Focus -151-tours

Bernard Pico

Un public partenaire plutôt que consommateur

Nora Gontharet est la directrice du Pôle Culturel d’Alfortville. La semaine qu’elle consacre aux nouvelles écritures scéniques est l’occasion pour le public de participer à la création.

Publié le 10 octobre 2007

Repères philosophiques

Dramaturge érudit, Bernard Pico accompagne depuis longtemps Gilles Bouillon et éclaire son travail par une connaissance précise des sources et des échos philosophiques d’Othello.

Platon et le néoplatonisme

« On considère souvent Othello comme une tragédie domestique, moins métaphysique que Le Roi Lear ou Hamlet. Or je ne crois pas qu’elle le soit moins, elle l’est plutôt différemment. Cette pièce propose une image platonicienne ou néoplatonicienne d’un monde, celui d’Othello et de Desdémone, que vient détruire Iago, sorte de sophiste qui fait trafic de mots. L’harmonie du couple des amants est à l’image de l’harmonie d’un monde où le beau est le miroir du vrai, où le mariage est un libre acquiescement de l’âme à l’âme, un monde clos et cohérent bientôt perverti par le mal. »

Machiavel et Nietzsche

« Iago ne cesse de répéter qu’il « hait le Maure ». Or, il évoque trop de raisons pour en avoir vraiment. Iago est l’homme du refus, de la dé-liaison. Deux modèles peuvent servir à comprendre ce personnage. D’abord celui qu’on trouve chez Machiavel : un homme du côté de l’utilitaire, du prix, du social, qui pense que la volonté est supérieure à l’amour. Ensuite celui qu’on trouve chez Nietzsche, cet homme du ressentiment que le philosophe appelle la « tarentule » ou le « dyspepsique » : Iago tisse ses toiles autour des amants parce que le souvenir est chez lui une plaie qui suppure et qu’il est constamment blessé par tout ce qui est beau. »

Pascal et Giono

« Pour Iago, faire le mal est un sport, un divertissement. On peut penser à Pascal, bien sûr, mais aussi au Giono d’Un Roi sans divertissement et des Grands Chemins, où le héros triche aux cartes au ralenti pour avoir plus de chances de se faire prendre. Iago est un joueur, il jubile d’inventer, d’improviser, et va jusqu’à presque dire la vérité pour se faire prendre. Face au vide et au néant, il est celui qui, pour reprendre une phrase de René Char, choisit de « faire de l’art avant la mort », un artiste en quelque sorte. C’est lui qui mène la tragédie et son personnage pose la question des pouvoirs créateurs et destructeurs du théâtre. Cette pièce est la tragédie de Iago au sens où c’est lui qui l’invente. »


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