Frédérique Lazarini met en scène « Le Voyage de Monsieur Perrichon » de Labiche : une réussite tout en réjouissante fantaisie
Dans la grisaille ambiante, voilà que fait [...]
Fabien Gorgeart adapte et met en scène Les Gratitudes de Delphine de Vigan, un récit initiatique qui parvient dans ce lieu de fin de vie qu’est une chambre d’EHPAD à célébrer de manière joliment condensée la beauté de l’attention aux autres. Avec une formidable Catherine Hiegel.
Savez-vous que lorsque le langage peu à peu disparaît, lorsque la mémoire peu à peu s’étiole, souvent le souvenir de chansons aimées demeure et réconforte ? Dans cette adaptation du roman de Delphine de Vigan par Agathe Peyrard et Fabien Gorgeart, qui nous avait enchanté avec Stallone, sa première mise en scène d’après une nouvelle d’Emmanuèle Bernheim, le chant est un élément structurant et signifiant. Sur un plateau épuré, la mise en scène laisse émerger l’essentiel au-delà de la banalité du vécu, au-delà de l’environnement, et ce malgré notre finitude : elle met en valeur la beauté de l’attention à l’autre, de relations humaines sincères et attentives, qu’elles soient réelles ou même rêvées. Pascal Sangla dans une sorte de prologue joue en direct au piano quelques fameuses mélodies qui impliquent (et réjouissent) le public. Puis nous sommes chez Michka, dans l’un de ces moments où s’impose l’évidence que la personne qui vieillit ne peut plus rester seule, malgré les bracelets avec alarme et autres dispositifs. Ensuite advient le déchirant déménagement dans une chambre d’EHPAD, où les dits « résidents » vivent surtout dans l’attente de la visite de leurs proches – ici, la jeune Marie (pétillante Laure Blatter) – et se rendent bien compte malgré leurs fragilités de l’endroit où ils sont désormais relégués.
Naissance de liens empathiques
Souvent tristes, ces lieux de vie et de soin sont de plus en plus en manque de moyens. Il est vrai que les vieux ne se plaignent guère et ne sont pas une priorité. Puisque Michka, ancienne parolière « pour de grands altistes » souffre d’aphasie et confond les mots, elle retrouve chaque semaine l’orthophoniste Jérôme, qui aime son travail et aime les vieux. Des séances de travail propices à la confidence font naître un lien empathique entre les deux. Avec délicatesse et finesse, Fabien Gorgeart valorise sans aucune mièvrerie le besoin de l’autre, la beauté de la gratitude qui met en mouvement. Michka n’a en effet qu’un regret, celui de n’avoir pas remercié Nicole et Henri qui l’ont recueillie chez eux à La Ferté-sous-Jouarre de 1942 à 1945, lorsqu’elle était enfant, petite fille juive dont les parents furent assassinés dans les camps d’extermination nazis. La réussite de la pièce doit beaucoup à l’interprétation de Catherine Hiegel, ample, nuancée et subtilement équilibrée. Elle maîtrise savamment le langage singulier et plein de fantaisie de son personnage sans trop en souligner la verve comique, transmettant toute la force de son esprit et de sa volonté malgré sa fragilisation. À l’image de rêves réparateurs, à l’image du lien qui se tisse entre une scène et une salle, le rapport au réel est une conquête qui se joue mieux à plusieurs.
Agnès Santi
Du mercredi au samedi 19h, dimanche 16h. Relâches les 9, 11 et 12 mars. Dates supplémentaires les mardis 15 et 22 avril 19h. Tél : 01 42 08 00 32. Spectacle vu au CENTQUATRE-PARIS. Durée : 1h20.
Dans la grisaille ambiante, voilà que fait [...]
Marion Corrales raconte en chansons « [...]