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Avignon / 2024 - Entretien croisé / Marie Hurault et Franco Salvatore

« Emballage » de Marie Hurault et Franco Salvatore, dissection du capitalisme et joyeuse prise de conscience

« Emballage » de Marie Hurault et Franco Salvatore, dissection du capitalisme et joyeuse prise de conscience - Critique sortie Avignon / 2024 Avignon Avignon Off. Théâtre des Carmes-André Benedetto
Marie Hurault et Franco Salvatore © DR

Théâtre des Carmes / texte d’André Benedetto / mise en scène collective

Publié le 3 juin 2024 - N° 323

Marie Hurault, Franco Salvatore et Claude Djian reprennent le texte écrit par André Benedetto en 1970 : dissection du capitalisme, joyeuse prise de conscience, salvateur rappel pour les exploités.

Comment ce projet de reprise est-il né ?

Marie Hurault : À l’occasion des 60 ans du Théâtre des Carmes, que mon grand-père, Bertrand Hurault, avait cofondé avec André Benedetto, Sébastien et Pascale Benedetto m’ont demandé si je voulais lire certains de ses textes. Leur proposition m’a évidemment fait très plaisir et je me suis plongée dans ses œuvres jusqu’à tomber sur ce texte lumineux, écrit en 1970 pour expliquer de manière très simple des concepts compliqués.  Ils m’ont prêté des éléments de décor de la mise en scène initiale, et notre compagnie, La parole rouge, s’est lancé dans l’aventure en compagnie de Claude Djian, ancien membre de la troupe des Carmes, qui nous a beaucoup aidés. Nous avons construit une nouvelle version de la pièce avec sa vision et la nôtre.

« La naïveté d’Alexandre est géniale pour poser des questions évidentes : pourquoi suis-je payé après avoir travaillé ? Pourquoi le patron gagne-t-il plus que moi ? »

Que raconte la pièce ?

M.H. : C’est une farce tragique qui raconte l’histoire d’Alexandre Zacharie, qui n’a jamais travaillé. Avec sa femme, ils ont faim. Ils voient un poisson par la fenêtre. Il faut l’acheter pour le manger. Comment gagner de l’argent ? Le texte explique ce que sont le travail, sa marchandisation, le capitalisme, le salariat, l’exploitation…

Franco Salvatore : Toute cette histoire est vue par les yeux d’un personnage naïf et enfantin. On n’a pas besoin d’avoir lu Le Capital ou d’avoir des notions d’économie politique pour le comprendre. C’est une pièce pour tous les publics, très accessible.

M.H. : On y retrouve surtout toutes les problématiques d’aujourd’hui. En 2009, Benedetto a ajouté un acte, 40 ans après c’est pire, qui va encore plus loin en évoquant la mondialisation, la surproduction et la financiarisation de l’économie. On n’a pas changé de mode de production en changeant d’époque. On travaille toujours pour un patron même si on est passé de l’usine au bureau.

F.S. : Malgré l’abandon du travail dans les usines qui donne l’illusion de la disparition des ouvriers, c’est même encore pire, tant le télétravail, qui casse le groupe, entraîne une perte des engagements politiques. En changeant de lieu de travail, on ne se croit plus concerné par la retraite, la baisse des cotisations patronales, le déremboursement des transports. Or, il est très important de rappeler que l’on reste une force de travail exploitée par un patron, même si on travaille chez soi. Comment faire en sorte de défendre nos droits et essayer d’en avoir un peu plus ? La naïveté d’Alexandre est géniale pour poser des questions évidentes : pourquoi suis-je payé après avoir travaillé ? Pourquoi le patron gagne-t-il plus que moi ? Et tout cela reste très léger et drôle !

Comment le mettez-vous en scène ?

M.H. : En octobre, nous avons fait une première lecture très simple avec deux chaises. Nous avons utilisé le jeu avec le public, ce qui a très bien marché : nous avons donc conservé cette idée, simple et essentielle. Le résultat est donc très épuré, en interaction avec le public et soutenu par une musique en live.

F.S. : Aux versions de 1970 et de 2009, nous ajoutons la nôtre. Nous ajoutons ainsi les personnages de l’acteur et de l’auteur, selon plusieurs niveaux de narration, pendant que le musicien gère ce qui se passe en scène. Nous sommes surtout très fiers de pouvoir lancer La parole rouge avec ce projet : c’est un honneur de pouvoir le faire avec le Théâtre des Carmes.

 

Propos recueillis par Catherine Robert

A propos de l'événement

Emballage
du samedi 29 juin 2024 au mardi 9 juillet 2024
Avignon Off. Théâtre des Carmes-André Benedetto
6, place des Carmes, 84000 Avignon

Du 29 juin au 2 juillet à 18h30 et le 9 juillet à 17h. Tél. : 04 90 82 20 47. Durée : 1h05.

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