La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Danse - Entretien / Boris Charmatz

Danse de nuit

Danse de nuit - Critique sortie Danse Paris
Crédit : Ursula Kaufmann Légende : Boris Charmatz répète Danse de nuit.

MC93 - Friche industrielle Babcock / Beaux-Arts / Musée du Louvre / chor. Boris Charmatz

Publié le 25 septembre 2016 - N° 247

Une Danse de nuit en forme de performance à ciel ouvert, à déguster à l’heure du crépuscule, dans des lieux inédits.

Le titre de votre création, Danse de nuit, évoque les mystères et l’obscurité, mais aussi la licence liée à la nuit, dans un espace public…

Boris Charmatz : C’est un projet né avec Fous de danse, créé en 2015 sur cette immense esplanade Charles-de-Gaulle de Rennes. En même temps, nous avions vécu cette vague d’attentats, dont Charlie Hebdo. Il nous semblait alors crucial de questionner la liberté d’expression, la liberté artistique, et de voir des danseurs dans l’espace public, et pas seulement des soldats ou des policiers. Cette création joue avec les fantasmes, les angoisses, les peurs, mais questionne aussi la caricature, la liberté de parole, ou celle de danser sur les trottoirs.

C’est un titre qui, à Paris, évoque aussi la Nuit debout. Existe-t-il un rapport ?

B. C.: En tout cas, cela correspond à un vrai désir d’assemblée chorégraphique, d’être ensemble. Nous n’avons pas de gradin ni de scène, pas de micro ou de musique. On pourrait même le donner avec les seules lumières de la ville ou des étoiles, bref, très peu de choses, mis à part la perméabilité entre les corps.

Si la friche industrielle Babcock de La Courneuve peut s’apparenter à un espace public, c’est moins le cas avec la Cour Lefuel du musée du Louvre ou les Beaux-Arts…

B. C.: Ce sont des cours assez grandes. Au début j’étais un peu circonspect car ce sont des lieux d’héritage, de patrimoine… Et puis on nous a montré cette cour abandonnée du Louvre et j’ai eu envie d’y danser. Entretemps, des inondations l’ont détériorée et ils ont dû refaire le sol. C’est un endroit inconnu, à ciel ouvert, très rude, avec un immense escalier. En tout cas, j’aime l’idée qu’il y ait trois lieux différents à Paris.

« Une plongée au milieu de nos problèmes, de nos désirs, dans un précipité de mots et de gestes. »

Comment s’organise cette chorégraphie pour danse et voix, musique et texte, pour six interprètes ?

B. C.: Elle est basée sur une sorte de glossolalie, de logorrhée de gestes et de paroles. Il s’agissait au départ de dire n’importe quoi en dansant n’importe comment. D’une certaine manière on n’entend pas tout, on ne voit pas tout, c’est fugace. Ce sont des impulsions, des instantanés comme autant de décharges électriques. C’est un ensemble où la danse est très forte. Nous avons travaillé à partir d’improvisations, de morceaux de textes écrits aussi vite que dits, ce qui suggère une pensée qui file, qu’il faut rattraper… D’où la glossolalie. Ce n’est pas un discours rationnel ; au contraire, il laisse l’auditeur sidéré. Ça va trop vite et pourtant ça fait sens. On part de Charlie mais ça dérape sur Reiser, ça dérive perpétuellement. Il y a des lyrics de rap, des textes de l’artiste performer et écrivain britannique Tim Etchells, comme Starfucker. La pièce se termine par une séquence intitulée Eraser (effacement), qui retrace une quête d’anonymat dans la ville. Ne pas être suivi, fiché, échapper, disparaître, ne pas être reconnu, se perdre dans la foule… Des thématiques très actuelles. Il n’y a pas de prise de position, c’est plutôt une plongée au milieu de nos problèmes, de nos désirs, dans un précipité de mots et de gestes. Le sens essaime dans plusieurs directions.

 

Propos recueillis par Agnès Izrine

A propos de l'événement

Danse de nuit
du vendredi 7 octobre 2016 au dimanche 23 octobre 2016


La MC93 à la friche industrielle Babcock. Du vendredi 7 au dimanche 9 octobre. Ven. et sam. 20h30, dim. 19h

Beaux-Arts de Paris. Mercredi 12 et jeudi 13 octobre 20h.

Musée du Louvre (Cour Lefuel) avec le Théâtre de La Ville - En collaboration avec la FIAC. Du Mercredi 19 au dimanche 23 octobre Mer. au ven. 19h30, sam. et dim.19h30 et 21h30. Accès par le 8 quai François Mitterrand – 75001 Paris.

Dans le cadre du Festival d’Automne.

 

Tél. 01 53 45 17 17.

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