La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Autour de ma pierre, il ne fera pas nuit

Autour de ma pierre, il ne fera pas nuit - Critique sortie Théâtre
Patrick Palmero, émouvante Lullaby inventée par Melquiot.

Publié le 10 septembre 2007

Une ville qui pourrait être Naples, un été brûlant, des corps chauffés à blanc et des esprits broyant du noir : Franck Berthier s’empare avec ferveur de la ballade des perdus composée par Melquiot.

Sur la colline qui surplombe la baie, le belvédère et le cimetière. Sur le premier errent les corps avides des jeunes gens paumés, dans le second gisent les cadavres aurifères que Dan et Ivan dépouillent pour financer leur rêve de retraite en Suisse. Entre le plaisir et la douleur, la vie et la mort, l’espoir et l’angoisse, six personnages se débattent en tentant de donner un sens à leur dérive : Louis Bayle, le père (émouvant Patrick Palmero), se travestit en Lullaby, gagneuse déglinguée et nocturne, Laurie, qui aime Ivan mais jouit avec son frère, cherche la voie du plaisir dans la douleur, Dolorès porte comme un fardeau l’enfant dont Dan ne veut pas et Juste, poète alsacien maudit, essaie de trouver celle qui remplacera sa muse méprisante… En un texte théâtralement très efficace dont certaines répliques sont fulgurantes de justesse même si d’autres, parfois, maladroitement poétiques, sonnent faux, Fabrice Melquiot dresse le portrait incisif et grinçant de personnages qui hésitent entre vitelloni felliniens et ragazzi pasoliniens et incarnent de façon complémentaire les figures contrastées du rapport humain au désir et à la mort.

Voyage trépidant au cœur de la désolation

Franck Berthier choisit de mettre à vif les corps et les cœurs en une mise en scène rythmée qui sait tenir l’équilibre entre érotisme et tendresse, violence et drôlerie, âpreté et douceur. Les comédiens, en force et en tension, soutiennent le suspense haletant de cette quête existentielle et relaient avec conviction l’énergie imprimée par le metteur en scène à la pièce. Les espaces de jeu sont adroitement dessinés par des rideaux de tulle qui servent de support à des images projetées appuyant l’aspect onirique et fantasmatique de l’intrigue ponctuée par le sirop langoureux d’un Elvis de bazar dont les interventions piquantes rappellent que l’amour est la seule réponse valable aux questions posées par la vie. Avec fougue et hardiesse, Franck Berthier conduit fermement ses comédiens dans ce « road-movie au pays des perdus ».

Catherine Robert


Autour de ma pierre, il ne fera pas nuit, de Fabrice Melquiot ; mise en scène de Franck Berthier. Du 30 août au 28 octobre 2007. Du mercredi au samedi à 19h30 et le dimanche à 15h. Vingtième Théâtre, 7, rue des Plâtrières, 75020 Paris. Réservations au 01 43 66 01 13.

A propos de l'événement


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