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Théâtre - Critique

Arctique, Anne-Cécile Vandalem crée un thriller politique en eaux glacées

Arctique, Anne-Cécile Vandalem crée un thriller politique en eaux glacées - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre de l'Odéon-Ateliers Berthier
© Christophe Engels Arctique, dans la mise en scène d’Anne-Cécile Vandalem.

Texte et mes Anne-Cécile Vandalem

Publié le 19 décembre 2018 - N° 272

Après le succès de Tristesses (2016), qui explorait à travers une fiction saisissante la montée du populisme en Europe, Anne-Cécile Vandalem crée un thriller politique en eaux glacées, sans convaincre.

C’est lors d’un périple au Groenland qu’Anne-Cécile Vandalem a mesuré l’importance des enjeux géopolitiques et économiques cristallisés autour de cet immense territoire, sous souveraineté danoise mais en marche vers l’autonomie. Le réchauffement climatique y rend désormais possible l’exploitation de considérables ressources minières, ce qui attise l’appétit des multinationales. Créée suite à ce voyage immersif, la pièce mêle polar politique, thriller intimiste, et dystopie glaçante. Elle entrelace divers genres et registres, assemble aussi comme dans Tristesses divers outils : le théâtre, le cinéma et la musique. Nous sommes en 2025, quelque part entre le Danemark et le Groenland, sur l’Arctic Serenity, un ancien navire de croisière de luxe, remorqué pour être transformé en hôtel après avoir été victime d’un choc contre une plateforme pétrolière le soir de son inauguration, quelques années auparavant. Un groupuscule écologiste fut alors condamné pour cet attentat, qui coûta la vie à une militante. Sept passagers mystérieusement conviés par lettre anonyme se retrouvent à bord : une ex-Première ministre du Groenland, son ancien conseiller, une activiste repentie d’une association écologiste, un journaliste, la veuve d’un représentant de consortium, l’ancien commandant du navire et une adolescente. Ils sont à la dérive, car le remorqueur les a abandonnés en eaux internationales.

Labyrinthe mental

L’espace théâtral est ici la salle de réception art déco du navire, avec quelques tables et chaises éparses, et une estrade où se produit parfois un orchestre live. Une banderole scintille : « We love global warming ». Les personnages disparaissent régulièrement en coulisses, hors champ, dans des couloirs où l’action est filmée en direct et diffusée sur grand écran. Exaltés, tendus ou apeurés, en quête d’une forme de vérité, ils explorent le labyrinthe mental d’un passé traumatique lié à « l’accident » initial. Quasi cinématographique, l’écriture fragmentée enchaîne les situations, navigue du drame au burlesque, et agrège les différentes strates du récit en faisant écho à certaines œuvres (de l’étrangeté inquiétante des films de David Lynch à plusieurs scènes de Shining). Mais l’entremêlement des outils comme des diverses facettes de la fable affadit et dilue le propos. Trop elliptique, pas assez tranchante, la portée politique de la pièce est ici amoindrie par une construction formelle virtuose mais diffuse. Même l’intrusion du superbe ours blanc ne suffit pas à créer l’émotion. Malgré l’interprétation sans faille des comédiens, l’histoire se cantonne à son illustration sophistiquée sans ouvrir l’imaginaire.

Agnès Santi

A propos de l'événement

Arctique
du vendredi 18 janvier 2019 au dimanche 10 février 2019
Théâtre de l'Odéon-Ateliers Berthier
1 rue André Suarès, 75017 Paris.

du mardi au samedi à 20h, dimanche à 15h, relâche le lundi et le 20 janvier. Tél : 01 44 85 40 40.  Durée : 2h. Spectacle vu au Festival d’Avignon en juillet 2018.

Egalement les 14 et 15 février 209 à la Comédie de Saint-Etienne.

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