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"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Avignon / 2019 - Entretien / Pascal Rambert

Architecture de Pascal Rambert

Architecture de Pascal Rambert - Critique sortie Avignon / 2019 Avignon Festival d’Avignon
L’auteur et metteur en scène Pascal Rambert. Crédit : Vanessa Rabade

Entretien
Pascal Rambert
Cour d’honneur du Palais des papes / texte et mes Pascal Rambert

Publié le 23 juin 2019 - N° 278

C’est l’un des rendez-vous les plus attendus de cette nouvelle édition du festival d’Avignon. La création, dans la Cour d’honneur, du nouveau texte de Pascal Rambert par un groupe d’interprètes de prestige*. Un « memento mori pour penser notre temps ».

Vous dites, à propos des personnages d’Architecture, que chacun d’entre eux croit que donner sa vie pour la pensée et la beauté a un sens. Quelle place ces deux notions occupent-elles dans votre théâtre ?

Pascal Rambert : Une place fondamentale. D’ailleurs, au-delà même du théâtre, elles occupent une place fondamentale dans ma vie. Car je viens de la raison, de la philosophie. Un jour, j’ai dû faire un choix. Soit poursuivre dans la voie de la pensée, enseigner la philosophie, faire de cette discipline mon arme pour vivre. Soit choisir la beauté, c’est-à-dire l’art. Et j’ai choisi l’art. Mais finalement, la beauté et la pensée sont restées les deux jambes grâce auxquelles je marche. Car quand j’écris une pièce, j’élabore à la fois quelque chose de structuré et quelque chose de l’ordre de la pure poésie.

Qui sont ces femmes et ces hommes composant la famille située au centre de cette nouvelle pièce ?

P.R. : Ce sont des gens brillants, des personnalités extrêmement armées intellectuellement qui ne réussissent pourtant pas à faire barrage à l’avènement du national-socialisme (ndlr, Architecture débute aux premières années du XXème siècle, pour s’achever au moment de l’Anschluss). La question qui se pose est donc de savoir comment, si de telles personnes n’ont pas réussi à s’opposer au naufrage de leur société, nous pourrions parvenir aujourd’hui, dans une époque où les gens sont sans doute moins armés conceptuellement, politiquement, philosophiquement, à lutter contre cette barbarie si elle se présentait à nous.

« Pour moi, la Cour d’honneur est un véritable partenaire : un partenaire aussi important que les acteurs ou que le temps de la représentation. »

Les personnages de vos pièces portent les prénoms des comédiennes et comédiens qui les interprètent. De quelle façon ces derniers nourrissent-ils votre écriture ?

P.R. : S’ils n’étaient pas là, mes pièces n’existeraient pas. J’écris pour les acteurs, à partir des résonances corporelles et énergétiques que révèle leur rencontre sur le plateau. Un peu comme si je donnais des formes à des forces vitales qui, lorsqu’elles sont mises en présence, produisent des zones d’affrontement ou d’apaisement. Mon écriture repose beaucoup sur des rythmes, sur des associations voix-corps-sons qui ne pourraient pas naître si je ne savais pas pour qui j’écrivais.

Est-ce pour vous différent d’écrire une pièce pour la Cour d’honneur du palais des Papes ?

P.R. : Oui, c’est quelque chose de tout à fait à part. D’abord, parce que c’est un très grand privilège de jouer dans cet endroit de théâtre historique. Et puis, le lieu-même impose quelque chose. Pour moi, la Cour d’honneur est un véritable partenaire : un partenaire aussi important que les acteurs ou que le temps de la représentation. D’ailleurs, le statut des corps et des voix dans la Cour d’honneur n’est pas du tout le même que dans une salle ordinaire. Il y aussi la question de la diversité des publics. Sur l’ensemble des représentations, nous nous adressons à environ 20 000 personnes, qui bien sûr, ont toutes une histoire différente. Certaines ont l’habitude d’aller au théâtre, d’autres y vont pour la première fois, certaines sont jeunes, d’autres sont plus âgées… On touche à un échantillon extrêmement large et divers de la cité : il y a quelque chose d’un rêve du premier théâtre grec.

 

Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat

 

* Emmanuelle Béart, Audrey Bonnet, Marie-Sophie Ferdane, AnneBrochet, Arthur Nauzyciel, Stanislas Nordey, Denis Podalydès en alternance avec Pascal Rénéric, Laurent Poitrenaux et Jacques Weber.

A propos de l'événement

Architecture de Pascal Rambert
du jeudi 4 juillet 2019 au samedi 13 juillet 2019
Festival d’Avignon
Cour d’honneur du Palais des papes

à 21h30. Relâche le 7 juillet. Durée estimée : 3h. Tél : 04 90 14 14 14.

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