La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Avignon / 2019 - Entretien / Olivier Py

Olivier Py, l’Amour vainqueur et Macbeth philosophe

Olivier Py, l’Amour vainqueur et Macbeth philosophe - Critique sortie Avignon / 2019 Avignon Festival d’Avignon
Olivier Py, directeur du festival d’Avignon. Crédit : Christophe Raynaud De Lage

Entretien
Olivier Py

Gymnase du lycée Mistral / L’Amour vainqueur / d’après les contes de Grimm / adaptation et mes Olivier Py

La Chartreuse – CNES de Villeneuve-lez-Avignon /Macbeth philosophe / d’après Shakespeare / adaptation et mes Olivier Py

Publié le 23 juin 2019 - N° 278

Perspectives et bilan positifs pour le festival d’Avignon. Son directeur, Olivier Py, y mène, hors festival, tout un travail qui ancre la manifestation estivale dans son projet initial de démocratisation et de décentralisation.

Quel bilan depuis septembre dernier ?

Olivier Py : Nous avons continué nos activités ! D’abord en consacrant presque huit cents heures aux collèges et lycées, dans le cadre d’une action sociale qui porte ses fruits et intensifie le dialogue avec la ville. Certains destins en sont changés. Non pas que nous formions nombre de futurs artistes et acteurs, mais des vocations naissent : de journalistes, de techniciens, de collaborateurs à l’organisation du festival…  La Fabrica est un lieu de répétition et de création qui renforce aussi notre présence à l’année, et nous continuons le travail avec la prison du Pontet, qui reste modeste mais a un fort impact symbolique pour changer la relation avec la population. Tous les théâtres pourraient frapper à la porte des centres de détention : c’est un angle obscur de la démocratie qui mérite d’être investi. Sachant évidemment que tout cela se fait progressivement et patiemment, comme nous l’avons fait pour tisser des liens avec l’Education nationale.

« Créer une identité propre, moduler le rapport aux spectateurs, soutenir la création : telle est l’aventure du festival. »

Quel thème pour cette édition du festival ?

O.P. : L’odyssée. On cherche toujours un thème assez large pour convoquer des esthétiques différentes et poser une galaxie de questions. L’odyssée, c’est aussi le retour au poème, même si cela pose des questions politiques importantes, sur les migrants et sur l’Europe, pour ne citer que celles-là. Cette édition est particulièrement attentive à l’émergence : 70% des artistes invités ne sont jamais venus au festival. Il y a aussi une très forte proportion d’auteurs vivants. Nos soutiens continuent d’être présents même si le coût de la vie grignote les forces vives de la création. Nous ne voulons pas être un garage mais un lieu de création et de coproduction. Le festival perdrait son identité en devenant une liste de spectacles. Créer une identité propre, moduler le rapport aux spectateurs, soutenir la création : telle est l’aventure du festival.

Pour la quatrième fois, vous adaptez un des contes des frères Grimm…

O.P. : J’y reviens toujours, comme je reviens toujours au théâtre pour les enfants. J’aime travailler pour les enfants et dans le cadre du théâtre musical : cette fois-ci, je me suis même amusé à écrire la musique, ce que je n’avais jamais fait auparavant. J’ai choisi Demoiselle Maleen, que Maeterlinck a adapté en tirant d’autres fils. A cause d’un amour interdit, une jeune fille est emprisonnée sept ans dans une tour. Quand elle sort, le monde qu’elle a connu est totalement détruit. C’est une histoire apocalyptique dans laquelle les genres sont libres. Une princesse habillée en guerrier, un jardinier qui voudrait être une fille, une fille de cuisine qui se rêve en corsaire… Le travestissement est un moteur présent chez les Grimm, où les filles occupent une place extraordinaire, mais il est aussi l’occasion d’une passionnante méta-théâtralité, et il offre aux enfants de se questionner sur leur pouvoir de devenir ce qu’ils sont.

Et quid de ce Macbeth philosophe ?

O.P. : Les détenus ont demandé à retravailler sur Shakespeare, et j’ai proposé Macbeth. En travaillant, je me suis rendu compte que ce personnage est sans arrêt en état philosophique. C’est un dictateur, mais un dictateur qui pense, et c’est en cela  qu’il est complexe. On aimerait qu’il soit un imbécile violent, ce qu’il n’est pas. Il pense dans la violence de son meurtre autant que Lear dans son exil et Hamlet dans sa vengeance. Shakespeare ne sait pas faire des personnages qui ne pensent pas ! Pour la cinquième année au Pontet, nous y retrouvons, avec Enzo Verdet, une troupe qui s’est constituée. Cette année, un des comédiens continue l’atelier même s’il est sorti de prison. Infime victoire, peut-être, mais je n’en connais pas d’autres !

 

Propos recueillis par Catherine Robert

A propos de l'événement

L’Amour vainqueur.
du vendredi 5 juillet 2019 au samedi 13 juillet 2019
Festival d’Avignon
Gymnase du lycée Mistral.

à 20h, les 6, 7, 11, 12 et 13 juillet à 15h et 20h. Relâche le 9. Durée estimée : 1h10.

Macbeth philosophe. La Chartreuse – Cnes de Villeneuve-lez-Avignon. Le 17 juillet à 15h, les 18 et 19 juillet à 11h et 15h. Durée : 1h. Tél. : 04 90 14 14 14.

x

Suivez-nous pour ne rien manquer sur Avignon

Inscrivez-vous à la newsletter

x
La newsletter de la  Terrasse

Abonnez-vous à la newsletter

Recevez notre sélection d'articles sur Avignon en Scènes