Akzak, l’impatience d’une jeunesse reliée, propos recueillis avec Héla Fattoumi et Eric Lamoureux

« Dès 2018, nous sommes allés à la rencontre de danseurs sur le continent africain. Dans le cadre de Viaouaga, un projet de coopération avec La Termitière à Ouagadougou, nous avons ainsi rencontré des jeunes de la formation Yeelen Don. L’idée était de les faire venir ensuite en immersion à Belfort, afin de suivre des ateliers, de voir des spectacles, de faire un travail pédagogique dans le cadre du programme transfrontalier franco-suisse Territoires Dansés en commun. Au Maroc, nous avons reçu le soutien du chorégraphe Taoufik Izeddiou, qui partage notre réflexion. Cela a tout de suite été très riche d’être avec ces danseurs qui n’ont pas fait d’école, qui ont appris la danse en regardant des vidéos, en dansant dans la rue… Après avoir animé des ateliers à Marrakech, trois d’entre eux ont accepté de faire partie du projet. Le troisième pays dans le triangle d’Akzak, c’est la Tunisie, pays d’origine d’Héla. Trois danseurs tunisiens, formés par Imed Jemâa, participent au projet. Tous sont manifestement dans une relation d’urgence à la danse. Ils ont ensuite été rejoints par trois danseurs français qui ont une expérience forte de la scène. Nous les avons réunis autour d’un travail sur le rythme et la pulsation.

Faire rythme ensemble

Comment faire rythme ensemble ? C’est le premier enjeu. La matière chorégraphique est faite de partitions rythmiques écrites à plusieurs. Cela nous met en difficulté, c’est une mise en contrainte pour trouver une pulsation, accélérer, décélérer, trouver la syncope, le contretemps. Akzak vient du terme turc aksak qui signifie « à contretemps » dans la musique ottomane. Le percussionniste et compositeur Xavier Desandre Navarre est très présent : il crée les partitions à partir des improvisations des danseurs et les restructure. La matière-liège qui est au sol est aussi un partenaire sonore. Ses copeaux évoquent l’image d’une terre aride, et le piétinement des danseurs renvoie à cette jeunesse qui piaffe, reliée par une façon de vivre la danse. »

Propos recueillis par Nathalie Yokel (en février 2020)