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Entre road-movie et fait divers, la bande dessinée à succès Zaï zaï zaï zaï de Fabcaro offre au Théâtre de l’Argument la matière d’une réjouissante fiction radiophonique en public. Où la société de consommation et les médias en prennent pour leur grade.
Pour Maïa Sandoz, Paul Moulin et leur fidèle bande du Théâtre de l’Argument, toutes les formes sont bonnes pour taper sur les dérives du néo-libéralisme. Pour questionner la liberté de l’individu à l’ère de la communication et de la surveillance. Créé la saison dernière à la Ferme du Buisson à Noisiel, dans le cadre du PULP Festival consacré au 9ème art et à ses rencontres avec d’autres disciplines, Zaï zaï zaï zaï n’a en effet que peu de points en commun avec Stück Plastik, une pièce en plastique. Si ce n’est un rejet catégorique des conventions sociales. Une cruauté envers tous ses représentants, que Fabcaro et Marius von Mayenburg, auteurs des deux œuvres portées sur le plateau par la compagnie basée en région parisienne, déploient chacun avec son langage : la bande dessinée pour le premier, et le théâtre pour le second. Adaptée par Maïa Sandoz et mise en scène par Paul Moulin, Zaï zaï zaï zaï a toute la légèreté et la folie qui font défaut à Stück Plastik. Dans le road-movie à bulles de Fabcaro, un auteur de bandes dessinées se retrouve en cavale pour avoir commis une faute impardonnable : l’oubli de la carte du magasin où il vient de faire ses courses.
Chasse à l’auteur
En optant pour une fiction radiophonique en public, Paul Moulin rend justice à la subtilité du trait et du texte de Fabcaro. À son sens de la dénonciation par l’absurde. Alignés à une table, derrière des micros et tout près de quelques bruiteurs, les comédiens Aymeric Demarigny, Adèle Haenel, Emmanuel Noblet, Aurélie Verillon, Maxime Coggio, Élisa Bourreau, Christophe Danvin et Cyrille Labbé se lancent dans Zaï zaï zaï zaï à la manière de conteurs aussi branchés que bricoleurs. Mené tambour battant, le récit des aventures de Fabrice, sorte d’autoportrait fictif de l’auteur, laisse souvent place à des moments de jeu. Se répartissant la cinquantaine de personnages que le héros croise dans sa course – parmi lesquels des caissières de magasin, des policiers bagarreurs, des journalistes accros au scoop ou encore des hommes politiques au laïus ultra-sécuritaire –, les huit interprètes se livrent à des fantaisies vocales d’autant plus savoureuses qu’ils déploient leurs astuces à vue. Inventant pour chaque situation, pour chaque gag, une solution sonore différente, ils font appel à leurs outils techniques ainsi qu’à une panoplie d’objets du quotidien avec un plaisir manifeste. Car dans leur jeu de massacre radiophonique, c’est une énergie purement théâtrale qui les anime. Une joie qui touche au cœur.
Anaïs Heluin
à 19h30, le samedi 2 à 16h et 19h30. Tel : 01 56 08 33 88. www.lemonfort.fr. Spectacle vu à la Ferme du Buisson.
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