Les Plateaux – 20ème édition
C’est toujours le même esprit qui guide les [...]
Un ballet organique : c’est la volonté de cette pièce signée Mourad Merzouki, née de la rencontre entre des danseurs français et taïwanais.
Le spectacle s’ouvre sur un alignement de corps, aux formes indéterminées, aux évolutions dignes des colonies d’insectes les plus organisées. Bêtes à peine sorties de leurs chrysalides, insectes rampants, entités extra-terrestres ? Ils semblent cependant ne constituer qu’un seul corps, mus par une force chorégraphique structurant leur forme et ne laissant rien au hasard. Le hasard est une donnée qui semble effectivement bannie du projet de Mourad Merzouki. Basé pourtant sur la rencontre entre deux groupes qui ne se connaissaient pas (les danseurs français et ceux du Chiang Kai Shek Cultural Center de Taipei), le spectacle aurait pu livrer son lot de surprises. Il préfère s’appuyer sur la beauté et le ravissement, pour ne pas dire la séduction, apportée par des danseurs contemporains taïwanais maîtrisant le mouvement à la perfection, jusqu’au moindre déploiement de bras quasi néoclassique, et rivalisant de virtuosité avec les danseurs de hip hop. Ensemble, ils explorent le monde d’en bas, fait de reptations, de déplacements au sol, d’emmêlements de corps, pour mieux décoller ensuite et libérer le geste vers des envolées lyriques et des portés puissants.
Spectacle total
Si mélange il y a, c’est bien dans la recherche d’un vocabulaire allant au-delà des stéréotypes du hip hop – quitte à tomber dans ceux du contemporain. Mais le voyage à Taiwan a porté ses fruits à bien d’autres égards. A défaut de faire sens, le spectacle préfère faire image, et il y parvient grâce au formidable travail des costumes et de la scénographie, magnifié par les lumières. La scène est littéralement métamorphosée par le travail de la matière-laine, tantôt en lourde enveloppe, tantôt en légers rideaux de fils. Le styliste et designer taïwanais Yohan Ku a sculpté l’espace et les corps, faisant de Yo Gee Ti une symphonie pour les yeux. La pièce oscille entre expériences dignes de Nikolais et spectacle total à la façon d’un ballet. Un ballet qui ne manque pas de corps, mais dont on chercherait en vain l’argument.
Nathalie Yokel
C’est toujours le même esprit qui guide les [...]