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Théâtre - Critique

Yngvild Aspeli sonde les profondeurs de l’âme humaine avec « Une maison de poupées »

Yngvild Aspeli sonde les profondeurs de l’âme humaine avec « Une maison de poupées » - Critique sortie Théâtre DIJON Théâtre Dijon Bourgogne - CDN
Une maison de poupées de la Compagnie Plexus Polaire © Johan Karlsson

Théâtre Dijon-Bourgogne CDN

Publié le 2 mars 2024 - N° 319

Avec Une maison de poupées, Yngvild Aspeli (cie Plexus Polaire) creuse la veine d’un théâtre de marionnette contemporain à la fois réfléchi et méticuleux. En s’appuyant sur l’œuvre d’Henrik Ibsen, elle continue de sonder les profondeurs de l’âme humaine.

Cette pièce au propos d’une étonnante modernité mais à la langue un peu vieillie, Yngvild Aspeli se l’approprie résolument : elle resserre, et ajoute une scène d’exposition dans laquelle elle raconte comment l’incident morbide d’un oiseau qui se fracasse sur une vitre de sa maison la pousse à choisir dans sa bibliothèque le volume où se trouve le texte d’Ibsen. En un court monologue, elle nous livre les clés de sa lecture de la pièce : l’enjeu de la liberté, l’obstacle des murs invisibles, la présence de la mort aussi qui ici est métaphore de l’aliénation de la femme mariée, cadenassée dans les rôles imposés par une société qui en fait un être inférieur.

Exposer les plus intimes ressorts des personnages

Avec une méticuleuse froideur, Yngvild Aspeli explore les mécaniques cachées sous le texte d’Ibsen et les fêlures de ses personnages, montre l’hypocrisie du jeu de masques exigé par un ordre social rétrograde, révèle la vacuité des existences ainsi vécues. Elle se sert d’un vocabulaire qu’on lui connaît : corps transformé par des prothèses, marionnettes monstrueuses d’abord suggérées puis représentées à des échelles qui écrasent l’humain. Elle a l’audace de manipuler presque seule une famille entière de marionnettes, qui sont ainsi laissées immobiles à vue. Elle joue sur les doubles, en faisant finalement porter les rôles des époux par des comédiens. L’ensemble est intelligent, même si la gymnastique imposée par le surtitrage peut parasiter la réception de l’œuvre. Le parti-pris d’un traitement froid, très cérébral, donne d’autant plus de relief aux quelques scènes où la vérité des êtres jaillit en un débordement incontrôlable. Si l’on n’est pas gêné par la façon radicale d’employer la convention marionnettique, c’est une mise en scène qui donne à réfléchir.

Mathieu Dochtermann

A propos de l'événement

Une maison de poupées
du mardi 12 mars 2024 au mercredi 20 mars 2024
Théâtre Dijon Bourgogne - CDN
23 rue Courtepée, 21000 Dijon

relâche le 17. Tél. : 03 80 68 47 47. Également les 23 et 24 mars 2024 aux Gémeaux, Scène Nationale de Sceaux (dans le cadre du festival MARTO) et les 28 et 29 mars au Bateau Feu, Scène Nationale de Dunkerque.

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