Vilar, notes de service

Clope au bec, chapeau mou et salopette, assis en bord de scène dans la Cour d’honneur, ou immortalisé par Varda dans les grands rôles du début d’Avignon… « Vilar, Salazar » ou le théâtre « comme l’eau, le gaz et l’électricité »… Le récit des déambulations nocturnes dans les rues de la cité des Papes, la compagnie solaire de Maria Casarès et Gérard Philipe… Mais que sait-on vraiment de l’homme derrière la légende ? Acteur mais aussi chef de troupe, metteur en scène mais aussi organisateur de tous les détails qui transforment l’art en culture et la culture en bien commun, Jean Vilar était un homme infiniment plus complexe qu’il n’apparaît sur les chromos du théâtre populaire.

L’artiste et l’artisan

C’est l’artisan sous l’artiste que ressuscite François Duval en adaptant les notes de service que Vilar punaisait sur un tableau en liège dans les couloirs de Chaillot et les coursives du Palais des Papes. Après l’avoir créé en 1996, François Duval reprend aujourd’hui ce spectacle dans une nouvelle mise en scène, pour à nouveau faire entendre le sens et l’intérêt de ces paperolles émouvantes. « Contrairement à l’origine où j’avais dirigé un acteur qui incarnait Vilar, aujourd’hui il me semble plus crédible, voire plus fort de mettre la parole à distance, grâce à l’objet scénique de la brochure que je semble lire parfois, alors qu’il n’en est rien. J’ai voulu isoler cette parole pour mieux la faire entendre, ne pas l’emprisonner dans une pâle imitation que peut induire l’incarnation. » Au milieu de sièges recouverts qui campent le décor d’une salle encore fiévreuse, François Duval dit l’envers du théâtre et son endroit le plus intime.

Catherine Robert