La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Entretien Jacques Téphany

Vilar, familier et distingué

Jacques Téphany dirige la Maison Jean Vilar, à Avignon. Entretenir la flamme plutôt que conserver les cendres : tel est le leitmotiv de celui qui prend une part active à l’anniversaire du centenaire du fondateur du TNP.

Publié le 5 septembre 2012 - N° 201

Jacques Téphany dirige la Maison Jean Vilar, à Avignon. Entretenir la flamme plutôt que conserver les cendres : tel est le leitmotiv de celui qui prend une part active à l’anniversaire du centenaire du fondateur du TNP.

 « Vilar a tout inventé ! »

Qu’était le TNP de Vilar ?

Jacques Téphany : A propos du TNP, Vilar disait : « je ne me souviens que d’un ensemble » ; et cet ensemble était au service de ceux qu’il appelait « mes populaires ». C’est peu dire qu’il était entouré par les meilleurs : Jarre, l’affichiste Jacno, Agnès Varda, et tous les comédiens. Avec eux, il a eu toutes les audaces, et a réussi à mettre à genoux le monstre qu’était Chaillot, qui était, faut-il le rappeler, une salle de congrès et non pas un théâtre. Fin du pourboire aux ouvreuses, spectacles à 20h, pour que les spectateurs ne rentrent pas trop tard chez eux, accueil en musique et avec de la vidéo sur des écrans de télévision, distribution du programme et vente du texte de la pièce pour une somme modique : il a tout inventé !

Le Théâtre de Chaillot accueille Artaud-Barrault. Quels rapports entre ces deux géants et Vilar ?

J. T. : Barrault était un peu le grand frère de Vilar, un copain plus qu’un ami. « Il aime trop le théâtre », disait Vilar de Barrault ! Au lendemain de l’éviction de Barrault de l’Odéon, Vilar fut le seul à trouver cette éviction « dégueulasse » ; et la première chose que fit Vilar en 1969, fut d’inviter le réprouvé à Avignon. Malgré leurs différences, il y avait entre eux une sorte de complicité de gentlemen. Quant à Artaud, Vilar a toujours reconnu sa leçon ; il faut dire que le dialogue de Vilar avec la folie est certain, profond. Dans ce spectacle, Stanislas Roquette fait une performance remarquable. Ces textes sont prodigieux quand on les lit, mais interprétés avec cette flamme, ils deviennent exceptionnellement tragiques. Guidé par un maître comme Guénoun, cet homme d’une intelligence supérieure, Stanislas fait parvenir le sens et la poésie du texte, en une heure qui ressemble à une pépite. Il n’y a pas de mots théoriques pour raconter cela. Guénoun, qui a tous les outils du théoricien, parvient, avec ce jeune acteur, à rendre le texte populaire, accessible au savant comme à l’ignorant. Au théâtre, il faut se méfier des « arguties, poudre aux yeux et hypothèses d’école », disait Vilar. Etre à la fois familier et distingué : voilà ce que réussit ce spectacle.

Propos recueillis par Catherine Robert

A propos de l'événement

souvenirs croisés entre Antonin Artaud et Jean-Louis Barrault
du mercredi 3 octobre 2012 au samedi 13 octobre 2012
_THEATRE DE CHAILLOT
Place du Trocadéro, 75016 Paris

Artaud – Barrault, lettres et souvenirs croisés entre Antonin Artaud et Jean-Louis Barrault, du 3 au 13 octobre à 19h, relâche les 7 et 8. Exposition Le monde de Jean Vilar, dans le Grand Foyer du théâtre, du 10 octobre au 19 décembre. Le 31 octobre, lecture par Denis Podalydès d’extraits de la correspondance de Vilar à sa femme. Tél : 01 53 65 30 00.
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