La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Avignon / 2017 - Entretien / Dorothée Munyaneza

Unwanted

Unwanted - Critique sortie Avignon / 2017 Villeneuve-lès-Avignon Festival d'Avignon. La Chartreuse
Crédit : Julienne Munyaneza Légende : Dorothée Munyaneza

La Chartreuse de Villeneuve lez Avignon / conception Dorothée Munyaneza

Publié le 25 juin 2017 - N° 256

Après Samedi détente (2014), où elle mettait en danse et en musique ses souvenirs du génocide rwandais, la chorégraphe et chanteuse Dorothée Munyaneza continue de se confronter à l’histoire tragique de son pays. Dans Unwanted, elle dit les traces laissées par le massacre. Par le viol, utilisé de façon massive comme arme de guerre en 1994.

Après la pièce autobiographique Samedi détente, votre premier projet personnel, vous décidez de porter une parole collective. Pourquoi ?

Dorothée Munyaneza : Continuer de travailler sur la mémoire des rescapés Tutsis était pour moi une évidence. Je me demandais de quelle manière le faire, lorsque j’ai découvert les documentaires Rwanda, la vie après – paroles de mères d’André Versaille et Benoît Dervaux et Mauvais souvenir de Marine Courtade et Christophe Busché, sur les viols commis pendant le génocide rwandais. Entre 100 000 et 250 000. Il m’a semblé urgent de porter cette parole qui commence à se libérer mais que l’on entend peu.

Vous êtes allée rencontrer des victimes au Rwanda. De quelle manière les témoignages recueillis ont-ils nourri votre travail ?

D.M : Après le génocide, quelques associations de soutien aux femmes victimes de viols ont été créées au Rwanda. Grâce à l’une d’elles, du nom de Sevota, j’ai en effet pu rencontrer une soixantaine de femmes ainsi que de nombreux enfants. Bouleversants à la fois de violence et de beauté, de désir de se relever, leurs mots ont été enregistrés. Ils sont présents dans la composition sonore réalisée par Alain Mahé, ainsi que dans les chants que j’interprète avec la chanteuse afro-américaine Holland Andrews. Et bien sûr, ils nourrissent nos corps et la chorégraphie.

« Chez les femmes qui m’ont livré leur témoignage, la marche est une forme de résistance à la violence subie. »

Vous avez aussi associé le plasticien d’origine sud-africaine Bruce Clarke au projet. Ressentiez-vous le besoin d’élargir le propos à d’autres conflits  ?

D.M.  : Bruce Clark a travaillé à plusieurs reprises au Rwanda, notamment pour Les Hommes Debout, projet collectif de peinture murale sur les lieux de mémoire du génocide. Sa participation s’est surtout imposée afin de convoquer de manière poétique toutes les femmes que j’ai rencontrées. Il a suivi l’ensemble du processus de création et m’a proposé une œuvre plastique monumentale montée sur une structure en tôle ondulée, qui symbolise la dignité de ces personnes. Sans couleur ni origine déterminée, sa figure fait en effet écho à d’autres drames. Celui de la Yougoslavie, du Congo, de la Syrie…

Comment vont s’articuler cette création plastique, la danse, le chant et la bande son ?

D.M  : L’ensemble des éléments de la pièce participe de ma réflexion sur le mouvement du corps meurtri. Chez les femmes qui m’ont livré leur témoignage, la marche est une forme de résistance à la violence subie. La danse et le chant aussi, pour celles qui ont la force de s’y livrer. En réunissant plusieurs manières de témoigner de cette force, je tente d’en approcher la vérité.

 

 

Propos recueillis par Anaïs Heluin

A propos de l'événement

Unwanted
du vendredi 7 juillet 2017 au jeudi 13 juillet 2017
Festival d'Avignon. La Chartreuse
58 Rue de la République, 30400 Villeneuve-lès-Avignon, France

à 18h. Relâche le 10. Tel : 04 90 14 14 14. Durée : 1h15.

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