L’amour conjugal
Matthieu Roy reprend son adaptation du roman [...]
La pièce intimiste, sans artifice, met en scène deux amoureux dans l’attente du premier baiser, en bousculant les clichés et les idées reçues. Un joli moment de théâtre.
Une partie de cache-cache tient lieu de lever de rideau. Le jeu enfantin du « pas vu, pas pris » sert de contrepoint métaphorique à ce qui va réellement se jouer entre les deux principaux protagonistes de cette poétique petite forme théâtrale. « Elle » (Flora Diguet) et « Lui » (Nathan Bernat) se sont vus et sont épris l’un de l’autre. Ils ont rendez-vous. Chacun d’eux sait que le moment du premier baiser est arrivé, qui décidera d’un avant et d’un après en faisant événement. A leurs lèvres, le temps est suspendu. L’auteur, Laurent Cazanave, étire cet instant crucial et mémorable, universellement vécu, en donnant à entendre le monologue intérieur de ces deux figures d’amoureux, l’une féminine et l’autre masculine, candides érotisés en proie aux tourments et aux pudeurs propres à la profondeur de leur sentiment. Comme il le note, il s’agit pour lui « de retrouver la pureté du sentiment et du désir amoureux et de le détacher de tout ce qui aujourd’hui peut le rendre trivial et banal ».
Un instantané féérique
Le décor stylisé inspiré par l’art du kirigami plante, en quinconce, sur le plateau, une forêt d’arbres de papier blanc, aux troncs minces et effilés dont le feuillage découpé dans l’arrondi rappelle la prime enfance du dessin. Au sol, quelques feuilles gisent, froissées, pour parfaire l’illusion féérique, celle du « il était … ou il n’était pas… ». Les joueurs de la partie de cache-cache sporadiquement reprise au fil de la représentation, « L’un » (Michaël Pothlichet) et « l’autre » (Hector Manuel), tout de blanc vêtus, se fondent dans le décor, présences fantomatiques chorales porteuses de la mémoire collective, témoins muets (néanmoins aux manettes musicales) de la scène qui se joue entre « Elle » et « Lui ». Les quatre comédiens aux belles qualités de jeu – et qui, pour trois d’entre eux, ont en commun d’avoir été formés à l’Ecole du Théâtre National de Bretagne, comme l’auteur et metteur en scène – entrent avec élégance dans la photographie intemporelle de ce rafraîchissant moment de grâce, celui d’un premier baiser.
Marie-Emmanuelle Dulous de Méritens
Du mardi au samedi à 19h30. Tél : 01 42 36 00 50. Le jeudi 18 octobre à 20h30 au SEL, 47, Grande Rue, 92 310 Sèvres. Tél : 01 41 14 32 32. Durée : 1h15.
Matthieu Roy reprend son adaptation du roman [...]