Lux/Glory
Le Ballet du Grand Théâtre de Genève présente [...]
La 22e édition décline le hip-hop sur tous les tons et se veut toujours aussi créative.
Attention à la bourrasque ! Depuis plus de vingt ans, un vent de liberté souffle la mesquine froidure et les humeurs chagrines plantées en épines au coeur de l’hiver, passe joyeusement les frontières des genres et délasse avec bonheur les muscles et articulations… C’est que Suresnes Cités Danse lance en rafales des créations qui pétillent d’énergie, souvent claquent comme autant de décharges d’invention. Le festival montre ainsi toute la créativité du hip-hop quand il va voir ailleurs et se frotte aux autres danses, décoiffant les petits esprits qui ne voudraient y voir qu’un mieux disant social ou le pratique alibi cédé aux injonctions populaires. Il reste ainsi fidèle à son ambition première : « mettre à l’honneur la technique du hip-hop tout en donnant droit de cité à d’autres formes de danse », résume Olivier Meyer, directeur du Théâtre de Suresnes – Jean Vilar, qui conçut cette manifestation pionnière en 1993, alors que le mouvement perçait à peine le gris béton des banlieues comme une rageuse poussée de fièvre. En repérant les talents, en organisant la rencontre entre artistes pour susciter des projets croisés, mais aussi en rassemblant des publics fort divers dans un même plaisir, il dessinait la ligne de perspective d’un événement résolu à donner droit de cité au hip hop tout en évitant la ghettoïsation.
Cinq créations à découvrir
Quelque onze chorégraphes composent l’affiche de cette 22e édition. Le geste toujours facétieux et la curiosité aiguisée à point, Laura Scozzi pioche dans tous les contes, qu’elle découpe menu et recolle à sa manière. Chez elle, Blanche neige porte la barbe bleue, le Chaperon rouge veille sur les Sept petits cochons, Cendrillon ne retrouve pas sa pantoufle, et ainsi de suite. La féerie se tord de rire, pour mieux encaisser les mauvais coups de la vie. Avec The Roots, Kader Attou se glisse entre les failles de la mémoire et remonte à l’origine de son désir de danse. Autour d’un vieux tourne-disque, qui berce les souvenirs en musiques, les onze interprètes révèlent à fleur de peau l’émotion propre au mouvement, par delà la technique et la virtuosité. Dans Apache, Hamid Ben Mahi frotte la verve nerveuse du hip-hop aux chansons de Bashung, qui emportent les peines d’amours perdues dans les élans rockers du vague à l’âme. Pas de blues en revanche chez les très jeunes danseurs de Soweto, qui mixent hip-hop, rythmes zoulous et danses traditionnelles dans un puissant tourbillon nommé Sbuja (appellation dérivée du mot français « bourgeois »), un nouveau style urbain. Enfin, deux programmes de formes brèves, nées dans le cadre de Cité danse connexions, pôle de production, de diffusion et de transmission ouvert en 2007, complètent le programme. Chaussez donc vos baskets, puisqu’on vous dit que ça bouge !
Gwénola David
Du 10 janvier au 2 février 2014. Tél. : 01 46 97 98 10. A lire : Suresnes Cités danse, Hip-hop et Cies, 1993-2010, d'Isabelle Calabre.