Spekies

« L’avenir est aux fantômes »… Cette prémonition énigmatique, cueillie au cœur d’un ouvrage du philosophe Jacques Derrida, a guidé la création de Spekies (signifiant, en latin : apparence, aspect, vision). Magali Milian et Romuald Luydlin retournent le processus de disparition qui tendait la dramaturgie de leurs pièces précédentes et cherchent ici une forme d’apparition – celle d’une silhouette ultrasensible, transformée en relique. Ils ont passé commande à Caryl Férey, auteur de néopolars, d’un texte qui s’inspirerait du Livre des morts égyptien. « … celui sur qui la pluie cogne, celui qui n’éveille aucun dormeur, celui qui en compte des millions, celui qui dort dans son corps… » : sur le plateau couvert des reflets argentés de couvertures de survie, les mots égrainent en une hypnotique litanie mille et une façons d’être au monde. Tandis que le guitariste Marc Sens, à l’écoute des moindres vibrations, module la tension sonore, Magali Milian et Romuald Luydlin donnent chair à cette danse spectrale. Plus leur corps devient minéral, plus les objets prennent vie, plus l’espace devient charnel et s’emplit de fantômes…

Gw. D.