Solaris de Stanislas Lem, mise en scène de Pascal Kirsch

C’est une pierre angulaire de la science-fiction : le roman Solaris, écrit en 1961, l’année où l’URSS envoie un premier homme dans l’espace, a été porté au cinéma deux fois : en 1972 par Andreï Tarkovski puis en 2002 par Steven Soderbergh. À l’époque où le Polonais Stanislas Lem imaginait son récit, la guerre froide faisait planer la menace d’une guerre nucléaire et l’auteur dénonçait le risque d’extinction de l’humanité. Il situait son intrigue sur Solaris, un monde inhabité tournant autour de deux soleils et entièrement recouvert d’un immense océan qui intrigue les scientifiques de la Terre. Face à l’inconnu et à ses mystères, la tentation est grande de détruire cette planète énigmatique, faute d’arriver à la comprendre. Comme souvent en science-fiction, observer le monde et le comportement des hommes par un biais détourné permet une plus grande clairvoyance sur notre rapport au réel. Et si aujourd’hui, la guerre froide appartient à l’histoire, le risque d’extinction de l’humanité existe toujours, même s’il a d’autres causes, comme le réchauffement climatique, tout comme sont terriblement actuelles notre peur de l’inconnu et notre capacité à détruire.

Une catharsis bienfaisante

C’est précisément cet angle qui intéresse Pascal Kirsch. En portant Solaris sur les planches, il se demande : « N’est-ce pas une des fonctions du théâtre, sa place dans la cité, que d’être le lieu où tenter une expérience intérieure et collective, qui nous laisserait rêver ensemble à une autre manière d’être et de faire ? […] Cette fable métaphysique pourrait devenir au théâtre, sans qu’il y manque le plaisir d’un récit fascinant, une catharsis bienfaisante faite de jeu et d’incarnation ». Avec une équipe de chercheurs en astronomie et d’un créateur sonore pour imaginer un dispositif immersif et sensoriel, le metteur en scène vise à nous transporter loin dans l’espace tout en nous plongeant au plus profond de nous-mêmes.

Isabelle Stibbe