Singin’ in the Rain
THEATRE DU CHATELET / DE BETTY COMDEN, ADOLPH GREEN, NACIO HERB BROWN ET ARTHUR FREED
Publié le 21 décembre 2015 - N° 239Le Théâtre du Châtelet propose jusqu’au 15 janvier cette comédie musicale tirée du film de Stanley Donen et Gene Kelly dans la très intelligente mise en scène de Robert Carsen, chorégraphiée par Stephen Mear. Du cinéma à la scène, ce spectacle euphorisant est magnifiquement réinventé.
Depuis près de dix ans, Jean-Luc Choplin a fait découvrir au public du Châtelet la comédie musicale dans ses multiples avatars. Au fil des années, la programmation a révélé le musical, tel qu’il s’est illustré au 20e siècle à Broadway, un genre jusqu’alors méconnu – sinon méprisé – à Paris. West Side Story, The Sound of Music ou The King and I, toutes œuvres créées pour la scène, étaient, jusqu’à leur révélation au Châtelet, connues surtout des cinéphiles. Avec Singin’ in the Rain, comme l’an dernier avec Un Américain à Paris, le Châtelet va plus loin en proposant l’adaptation scénique plus que convaincante d’un musical originellement écrit pour le cinéma. Le film de Stanley Donen (1952), avec Gene Kelly et Debbie Reynolds, évoque le moment où l’histoire du cinéma bascule du muet au parlant. C’est une merveilleuse mise en abyme, où le cinéma se fait théâtre quand il parle du cinéma.
De l’écran à la scène
Avec la mise en scène de Robert Carsen, tout devient théâtre, y compris les codes du cinéma, depuis le « générique » qui accompagne l’ouverture jusqu’aux jeux de projection et de doublage, en passant par les mouvements de foule qui amènent le spectateur à faire son propre travelling. Tout le parcours construit par la scénographie amène le spectateur à se rapprocher de plus en plus de l’action, qu’elle figure le spectacle ou ses coulisses. Le metteur en scène réussit à porter sur scène la connivence que les changements de focale installent de part et d’autre de l’écran. En utilisant selon les scènes tout ou partie de la profondeur du plateau, Robert Carsen crée l’illusion de la proximité, tant dans les scènes de rue (l’entrée du théâtre ou, bien sûr, la chanson qui donne son titre à l’ouvrage) que dans les séquences d’intérieur (on assiste comme en « gros plan » aux fantaisies de Cosmo dans l’irrésistible « Make’em laugh » et la scène des essais de sonorisation est rendue dans toute sa drôlerie). Assumant l’hétérogénéité du récit, l’avant-scène tantôt retrouve son rôle du temps du music-hall (pour le numéro « Fit as a fiddle »), et tantôt figure l’envers de l’écran. Sur le plateau, la distribution fait la part belle aux artistes britanniques. Difficile en effet de trouver en France des artistes qui puissent porter à ce niveau de qualité le chant, le jeu, la danse et les claquettes (hormis Lambert Wilson, qui fait ici une apparition dans une scène filmée). Dan Burton (dans le rôle de Don Lockwood), Daniel Crossley (Cosmo Brown), Clare Halse (Kathy Selden) et Emma Kate Natson (Lina Lamont) sont tous des habitués du West End londonien. Cela se voit et s’entend. Dans la fosse, l’Orchestre Pasdeloup démontre une fois de plus qu’il a fait sien ce répertoire : quelle énergie et quelles couleurs obtient de ses musiciens le chef Stephen Betteridge !
Jean-Guillaume Lebrun
A propos de l'événement
Singin’ in the Raindu mardi 15 décembre 2015 au vendredi 15 janvier 2016
Théâtre du Châtelet
1 Place du Châtelet, 75001 Paris-1ER-Arrondissement, France
Tél. : 01 40 28 28 40.