La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Robert Plankett

Robert Plankett - Critique sortie Théâtre
Crédit : DR Légende : Les amis de Robert Plankett se confrontent au vide de sa disparition brutale.

Publié le 10 mai 2012 - N° 198

Inventant le théâtre à même le plateau, le collectif La Vie Brève dévoile avec pudeur et humour l’expérience intime de la disparition.

Des livres en piles et des notes en pagaille, des factures en souffrance, des chagrins d’amour… un poulet congelé. Robert Plankett, metteur en scène contemporain, s’en est allé brusquement, victime d’un accident vasculaire cérébral, laissant la béance de son absence au cœur de ses proches. Ses amis, sa compagne et une cousine germaine se retrouvent dans sa maison à la campagne, face à cette mort prématurée. Ils trient ses affaires, se confrontent au vide, résilient ses contrats, débarrassent son frigo… Autant de menues tâches qui effeuillent les histoires passées et libèrent les souvenirs coincés dans les craquelures du temps. Autant de mots qui crayonnent à petits traits le portrait ambigu du disparu. Peu à peu aussi, les échardes de la mémoire s’engouffrent dans les failles du présent, fouillent les rides sombres du deuil, griffent le réel pour y creuser la brèche d’une échappée secrète.

Le gouffre de la perte

Rassemblant des acteurs, des metteurs en scènes et une scénographe qui se sont rencontrés au cours de leur formation et dont certains ont travaillé avec l’artiste hongrois Arpad Schilling, le collectif La Vie Brève a composé la pièce à même le plateau, à partir de différents matériaux : littérature, documentaire, récits personnels, films, peinture, etc. Au seuil d’un rideau de papier kraft, qui obstrue la perspective tout comme la disparition soudaine de Robert Plankett, les uns et les autres taillent des épisodes dans leur mémoire comme autant d’échancrures sur le passé et laissent affleurer leur désarroi ou leurs questionnements intimes sous le prosaïsme des questions pratiques. Peu à peu se dessinent les personnalités, resurgissent aussi les banales rancœurs de cœur, les amers secrets, les querelles anciennes. Si les comédiens portent leur rôle avec grand naturel, ils restent cependant dans les traits de personnages convenus, accusés par le réalisme psychologique du jeu. Les dialogues aussi s’enferrent parfois dans l’anecdotique et tournent aux propos un peu mièvres de sitcom. Mariant gravité et humour, la mise en scène heureusement dynamite le drame en une narration éclatée et laisse jaillir ces instants troublants où se révèle l’émotion face au gouffre de la perte.

 

Gwénola David


Robert Plankett, création du Collectif La Vie Brève, mise en scène Jeanne Candel. Du 2 au 11 mai 2012, 20h30, relâche dimanche et lundi. Théâtre des Abbesses, 31 rue des Abbesses, 75018 Paris. Tél. : 01 42 74 22 77. Durée : 1h25.

A propos de l'événement


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