Résurrection par Leonardo Garcia Alarcon du Palais enchanté de Rossi

Spécialiste de la musique du seicento, Leonardo Garcia Alarcon aime à exhumer les joyaux endormis dans les rayons des bibliothèques, à l’exemple du Palais enchanté de Rossi, premier opus lyrique de celui qui introduisit l’opéra italien en France, avec Orfeo, commande du cardinal Mazarin. Inspiré par le Roland furieux de L’Arioste, avec son univers de chevaliers et de sorcelleries amoureuses, Le palais enchanté est un témoin des fastes de la cité papale sous Urbain VIII. Les dimensions sont monumentales et l’invention musicale foisonnante – plus d’une vingtaine de personnages, ballets, doubles et triples choeurs – et la création au Palazzo Barberini, en 1642, dura sept heures. Non content d’avoir une curiosité insatiable, le chef argentin pratique comme peu d’interprètes aujourd’hui, avec son ensemble Capella Mediterranea, ce que l’on pourrait qualifier de musicologie créatrice, en mobilisant le répertoire et les pratiques d’interprétations du baroque pour redonner vie à l’originalité des œuvres, au-delà des lacunes de la lettre des partitions. Confiée à Fabrice Murgia, la mise en scène s’appuie sur la vidéo pour renouveler, de manière contemporaine, la richesse spectaculaire de l’ouvrage, sans perdre de vue tout un potentiel expressif où les errances des âmes et du cœur des personnages légendaires se font aussi nôtres.  Si la première, à Dijon en décembre 2020, a été réduite à une captation et une diffusion en streaming, les représentations nancéiennes seront l’occasion pour le public de découvrir, enfin sur scène, un chef-d’œuvre servi par des interprètes de premier plan.

Gilles Charlassier