La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Pinok et Barbie

Pinok et Barbie - Critique sortie Théâtre
Photo : (Laurencine Lot) Poupées, pantins et peluches débattent.

Publié le 10 décembre 2007

Tout public

Lisa Wurmser fait scintiller la magie scénique de Pinok et Barbie, la pièce enfantine de Jean-Claude Grumberg. Un enchantement politico-artistique de marionnettes, de masques et de comédiens.

Sur le plateau, une maison de poupée comme un castelet réapparu, une boîte de Pandore, un coffre précieux à jouets. À son faîte, trône une Barbie dont le léger accent étranger de la lituanienne Diana Sakalauskaïté revivifie le standard : masque de blonde plastique, jambes longues et fille au grand coeur. Aux pieds de la belle qui se balance, veille Pinok lui-même, comme un soldat de plomb – avec masque au grand nez pour la grandeur nature de Thierry Collet. Dans la porte entrebâillée de la guérite, passent des têtes amicales – ours en peluche, guignol italien, ballerine de chair au tutu romantique rouge et autres jouets classiques d’enfance douce. C’est l’univers de Puce que joue avec gourmandise et malice la jeune Juliette Roudet, face à une Maman chérie à la fois autoritaire et conciliante, interprétée par Pascale Blaison, ombre chinoise et comédienne. Cette dernière a conçu non seulement les masques, les jouets, mais aussi la poupée et le pantin, les répliques mêmes des héros de l’histoire de Grumberg. Des marionnettes au second degré, comme une démultiplication des jouets des enfants occidentaux écrasés sous le poids des faux cadeaux, produits manufacturés jetés en vrac dans les bennes engorgées de nos sociétés de conso.

Des équipées de pantins noirs pour ces hordes d’enfants perdus
À l’inverse, du côté sud planétaire face à nos conforts et nos certitudes du Nord, règne le drame inéquitable des enfants soldats. Pinok et Barbie, comme des volontaires d’associations humanitaires échoués en Afrique guerrière, apprécient de visu la panoplie complète du parfait petit rebelle échue à ces enfants qui n’en sont plus. Et Pinok fait erreur : « Dire qu’on nous a bassinés avec les petits enfants sans joujoux. Tu vois ceux-là, ils ont tout, tout ! Des mitraillettes, des bazookas, des coupe-coupe, des machettes, des revolvers ! » Les soucis des uns sont diamétralement opposés à la terreur vécue par les autres. Des équipées de pantins noirs pour ces hordes d’enfants perdus, dirigés par un chef président, variablement soumis ou bien opposant au régime militaire. Le tyran, joué par Marius Yelolo, incite ses soldats de paille au pillage et à la violence. On regrette seulement qu’il n’y ait pas de figure alternative noire qui lutte contre cette image catastrophique. Mais le spectacle est pensé pour les enfants à partir de huit ans, et il n’est pas temps de faire l’analyse sociologique et historique d’un continent. Toujours est-il que Lisa Wurmser enchante et ravit son public, aspiré par l’émerveillement d’une scène qui sait conter l’horreur en la sublimant.
Véronique Hotte


A partir de huit ans
Pinok et Barbie
De Jean-Claude Grumberg, mise en scène de Lisa Wurmser, le 15 janvier 2008 à 19h30, le 19 à 20h45 et le 20 à 16h au Théâtre de Corbeil-Essonnes Tél : 01 60 89 75 47 Texte Heyoka Jeunesse Actes – Papiers .

Vue à la Comédie de Picardie. Tournée en cours. Rens 0322222028.

A propos de l'événement


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