Macbeth
Stéphane Braunschweig agence une mise en [...]
Irina Brook modernise l’histoire de Peer Gynt et aménage son chemin initiatique entre féerie et rock’n’roll, en un très beau spectacle, remarquablement composé, dirigé et interprété.
Peer Gynt, qui croise les genres, regorge de personnages, multiplie les rebondissements et s’affranchit des contraintes matérielles du théâtre, a la réputation d’être une gageure à mettre en scène. Choisissant d’adapter le texte en l’élaguant et en transformant la réussite du mauvais garçon devenu marchand d’esclaves en success-story rock’n’roll d’un petit gars de Norvège devenu une star odieuse, Irina Brook parvient néanmoins à en conserver le foisonnement protéiforme, la démesure onirique et fantasmatique, la folie joyeuse et la profondeur métaphysique. Sur le plateau nu, se succèdent les scènes de la quête de Peer Gynt, entre provocations, épreuves, bonheur et malheur, réussites et défaites, gloire et ruine. Acculé à la fuite pour avoir déshonoré une jeune mariée le jour de ses noces, Peer batifole parmi les Trolls, dont il engrosse la princesse d’un simple regard, puisque chez ce peuple, la pensée est performative ! Tel est peut-être la vérité de Peer Gynt : on n’est jamais que ce qu’on raconte, et le monde est sitôt que le verbe en accouche. Peer Gynt est un raconteur d’histoires – ainsi celles qu’il narre à sa mère et qu’il réinvente encore pour rendre son trépas plus doux – un effronté fort en gueule et en mots : un homme de théâtre.
Théâtre des merveilles
Irina Brook ne convoque presque rien d’autre que le brio des artistes qu’elle réunit. Quelques pétales de fleurs, quelques flocons tombés des cintres, quelques accessoires, des costumes chatoyants (très beau travail de Magali Castellan) et des masques poétiques et drôles (salut au talent de Cécile Kretschmar) suffisent à faire naître la magie et le suspense de cette histoire, dont on suit les péripéties haletantes avec émotion, admiration et stupeur. Les comédiens sont tous musiciens : autour de Shantala Shivalingappa (sublime Solveig) et d’Ingvar Sigurdsson (extraordinaire Peer Gynt), ils composent un ensemble talentueux, aussi précis dans l’interprétation physique que dans l’interprétation instrumentale. Comme un leitmotiv, revient la poignante et si belle chanson de Solveig, fil conducteur des aventures de Peer l’insolent, le débauché, le scandaleux, promesse et mémoire de son amour pur et sincère, et Grieg ressurgit comme par magie entre les notes du rock’n’roll (chansons d’Iggy Pop). Magistralement agencé, avec un rythme trépidant et une remarquable maîtrise des effets scéniques, ce spectacle est une brillante réussite.
Catherine Robert
du mardi au samedi à 20h, dimanche à 16h. Tél : 01 46 07 34 50. Durée : 2h45 avec entracte. Spectacle en anglais, surtitré en français.
Stéphane Braunschweig agence une mise en [...]