La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Entretien

Pauline Bureau

Pauline Bureau - Critique sortie Théâtre
Légende : « Pauline Bureau, metteuse en scène de Roberto Zucco. »

Publié le 10 mai 2010

Zucco vu comme la trajectoire d’une étoile filante.

Après Roméo et Juliette d’après Shakespeare, Pauline Bureau s’attaque à Roberto Zucco de Koltès dans la perspective du fait divers, du tragique dans le quotidien. Avec en filigrane, le cheminement de la violence qui déraille sur un passage à l’acte. Mystère non élucidé.

« L’écriture dans l’œuvre de Koltès en général, comme dans Roberto Zucco, est extrêmement contemporaine. Le verbe y est radicalement équivoque, la parole dit une chose et signifie le contraire. À l’intérieur de la violence, apparaît la douceur ; dans l’amour, la destruction ; dans la vie, la mort. Les concepts et les sentiments s’emmêlent comme dans la vie, de même les générations des personnages, avec la jeunesse de Zucco et de la Gamine, l’expérience de la Mère et du Vieil Homme dans le métro. L’écriture de Roberto Zucco répond à une vision fragmentaire et non continue de l’existence. C’est une pièce en quinze tableaux à la façon d’un Chemin de Croix symbolique, elle relève d’un regard cinématographique qui ne laisse jamais se succéder deux scènes dans un même lieu. Koltès écrit Zucco juste après avoir traduit le Conte d’Hiver de Shakespeare, il découvre avec éblouissement la liberté de l’écriture qui fait voler en éclats les règles classiques des unités.

La fulgurance des mots

Hormis une scène qui se passe en plein jour dans un parc, l’univers visuel de Zucco fraie d’abord avec la nuit de la ville : le Petit Chicago et la prostitution… Avec ma sœur Benoîte Bureau, traductrice et dramaturge, on s’est approprié Shakespeare en adaptant Roméo et Juliette ; en revanche, il a fallu se contraindre au texte intégral chez Koltès, une obligation passionnante. Les phrases évidentes s’imposent d’elles-mêmes. Et quand un aspect de la pièce nous échappe, nous devons trouver la solution car l’auteur ne se trompe jamais. Koltès fait accéder le fait divers au sublime et au mythe. Comment comprendre la déclaration finale du serial killer ? « Je suis le meurtrier de mon père, de ma mère, d’un inspecteur de police et d’un enfant. Je suis un tueur. » L’action tragique dans ses entrelacs renvoie chacun à ses propres mystères et fantasmes. Elle est donnée de façon brute, sans explication ni controverse. La vie se donne ainsi à travers la fulgurance des mots, leur impact transforme l’être à la recherche de lui-même. »
 
Propos recueillis par Véronique Hotte


Roberto Zucco, de Bernard-Marie Koltès ; mise en scène de Pauline Bureau. Du 6 mai au 6 juin 2010. Mardi, mercredi, vendredi, samedi 20h30, jeudi 19h30, dimanche 16h. Théâtre de la Tempête Cartoucherie 75012 Paris. Réservation : 01 43 28 36 36 www.la-tempete.fr

A propos de l'événement


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