Orlando ou l’Impatience
Théâtre de la Ville / texte et mes Olivier Py
Publié le 25 mars 2015 - N° 231Soutenu par une équipe d’acteurs hors pair, Olivier Py propose une comédie virevoltante explorant « le théâtre comme totalité et la totalité comme théâtre ».
Impatient, le jeune Orlando cherche son père et interroge sa mère, diva du théâtre : elle lui livre un nom puis d’autres, qui s’avèrent être autant de fausses pistes. Cette quête éperdue égrène diverses figures de père, et traverse un territoire infini de possibles du théâtre : politique, métaphysique, clownesque… Ce théâtre en action, c’est d’abord l’expression d’un désir impérieux et impétueux contre la mort, contre un réel rugueux et désespérant, et c’est une déclaration d’amour au théâtre, défendue avec maestria par une superbe équipe d’acteurs, chevronnée et merveilleusement accordée : Jean-Damien Barbin (fou avec variantes), Eddie Chignara (ministre de la Culture), Philippe Girard (les pères successifs), Mireille Herbstmeyer (la mère), Matthieu Dessertine (Orlando) et Laure Calamy (Ambre). « Orlando ou l’Impatience est un texte manifeste, systémique et programmatique. Programmatique parce qu’il parle de politique, manifeste parce qu’il parle du théâtre et du poème et systémique parce qu’il parle de tout, comme d’habitude. » confia Olivier Py à la création du spectacle lors du dernier Festival d’Avignon, première édition sous sa direction. La très belle scénographie de Pierre-André Weitz, qui signe aussi les costumes, fait vivre à plein la machine théâtrale en mouvement et révèle toute l’énergie d’un jeu sans frein.
Dialogue hilarant
La croyance en Dieu, l’art, la littérature, le politique, l’amour, le sexe : les thèmes se télescopent allègrement. Cette pièce se déploie comme une sorte de biographie diffractée entre les personnages et les situations, des éléments de réponses aux questions sur le sens de la vie virevoltent, rebondissent, se faufilent et s’échappent dans une atmosphère qui reste joyeuse et pleine d’énergie, structurée par certains leitmotivs obsessionnels. Le dialogue hilarant – mieux vaut en rire ! – entre le théâtre et le pouvoir démasque l’aventure collective du théâtre conjuguée aux impératifs politiques. Olivier Py choisit ici de rire des questions les plus essentielles, qui habitent le plateau de toute leur force entêtante et obstinée, insistante et débridée. En voulant tout embrasser de la condition d’artiste et du présent du monde, la mise en scène n’évite pas une certaine grandiloquence et les redites. Les grandes déclarations sont ainsi, toujours imparfaites et répétitives ! Demeurent le rire et ce savoir-faire impressionnant de l’artisanat théâtral, et toute l’intensité et la sincérité de cet amour du théâtre et du poème : une petite lampe dans les ténèbres… A Avignon, la pièce fut précédée du discours de Victor Hugo à l’Assemblée Nationale le 11 novembre 1848 : sidérant et splendide ! On voudrait le même en 2015, sa force est intacte !
Agnès Santi
A propos de l'événement
Orlando ou l’Impatiencedu mercredi 8 avril 2015 au samedi 18 avril 2015
Théâtre de la Ville
2 Place du Châtelet, 75001 Paris, France
du mardi au samedi à 20h, dimanche à 15h. Tél : 01 42 74 22 77. Durée : 4h avec entracte. Spectacle vu au Festival d’Avignon 2014.