La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Danse - Entretien

Nathalie Pernette

Nathalie Pernette - Critique sortie Danse
Crédit photo portrait : Dan Aucante Légende : Nathalie Pernette est l’invitée du festival Danses vagabondes en Limousin.

Publié le 10 mai 2012 - N° 198

Nathalie Pernette vagabonde en Limousin

Cette année, c’est Nathalie Pernette qui est à l’honneur du festival de la danse itinérante en région Limousin. L’occasion de découvrir sa dernière création, La Peur du loup, mais aussi ses Miniatures, petits bijoux de danse créés à l’épreuve de la rue.

 « Créer une forme d’ambiguïté mais ne pas être complètement à côté de la réalité. »

On connaît votre intérêt pour la boîte noire et les ressorts de l’illusion théâtrale. Comment vous est venue l’envie de vous confronter à l’espace extérieur ?

Nathalie Pernette : Dans l’histoire de la compagnie, j’ai commencé en étant à la fois dehors et dedans : on ne se posait pas la question de savoir où. C’est après que j’ai été happée par la salle et la boîte noire. Puis est venu le moment où j’ai eu artistiquement envie de rapprocher l’œil du spectateur de ma danse, qui est une danse assez précise, miniaturisée, en resituant ces corps en mouvement un peu extraordinaires dans un contexte ordinaire, et en essayant d’éviter cette sempiternelle frontalité que l’on trouve dans les théâtres. A la fois aller dans le sens de ma matière dansée, et trouver d’autres rapports au public.

Y a-t-il, dans la démarche de chaque Miniature, une prise en compte spécifique de l’espace ?

N. P. : Les pièces ne sont pas écrites pour un espace particulier et cependant il y a certains espaces qui leur conviennent et d’autres non. C’est essentiellement lié à des données d’énergies ou de mouvement naturel. En fonction de l’occupation des gens dans les lieux mêmes et de l’énergie qu’ils portent ou qu’ils ne portent pas, on s’accorde ou on se désaccorde avec le lieu. J’aime bien entretenir un rapport logique avec un lieu, mais j’aime aussi qu’on se décale par l’aspect un peu sombre de nos présences. Créer une forme d’ambiguïté mais ne pas être complètement à côté de la réalité.

Qu’abordent ces Miniatures que vous allez présenter en Limousin ?

N. P. : Il y en a six. Avec L’Apparition, je crée un moment dansé où les gens se sentent presque obligés de regarder les enjeux physiques de ce qui se déroule sous leurs yeux. L’Insomnie correspond à l’idée de faire un massage en mouvement, de proposer une parenthèse plaisante à quelqu’un du public en mettant à l’honneur des sensations physiques agréables. Les Oignons sont une conversation comme il peut en exister dans la rue. De fait, elle est dansée et se fait à travers dix-sept couches de vêtements. La Rose est davantage une espèce de claque que l’on essaye de donner au public en quelques minutes, sur une danse très technique, très articulée, très improbable dans l’espace public, pour aboutir sur un geste d’une très grande douceur qui est d’offrir une fleur. Le Verglas est une pièce sur l’effet de glissement permanent. La dernière, A Livre ouvert, est un trio, sur les paroles et les pensées qui nous échappent parfois, dans une espèce de conversation parlée-dansée, à la limite de la folie.

Vous présentez en forme « plateau » votre dernière création, La Peur du loup. Comment expliquez-vous le glissement qui s’opère au cours de la pièce, entre le début marqué par un imaginaire, et la fin, beaucoup plus triviale, presque crue, voire cruelle avec ses images fortes ?

N. P. : Je voulais vraiment travailler dans une variété de registres avec cette pièce. Effectivement, je glisse doucement de quelque chose d’assez abstrait vers des moments plus grotesques, burlesques, triviaux. Je voulais multiplier les points de vues, offrir au public des zones de drôlerie, de rêverie, et aussi des zones d’angoisse et d’autres où l’on peut être dégoûté, saturé, comme si on avait trop mangé. C’est un paroxysme que je trouve intéressant en terme d’émotion.

 

Propos recueillis par Nathalie Yokel


Danses vagabondes en Limousin, 5ème édition, du 22 mai au 2 juin, un projet de la scène nationale d’Aubusson. Tél : 05 55 83 09 10.

A propos de l'événement


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