Naître à jamais

L’amour qu’on croyait si fort et le mariage qui le fixe s’écroulent comme un château de cartes quand il s’agit de vivre en toute humilité dans l’oubli du passé et des chagrins. B., le protagoniste énigmatique de la pièce, est acculé au divorce. Il se voit dans l’incapacité à faire la part des choses entre passé et présent, inapte au recul et à la distance qu’imposent les années face à soi et à sa propre représentation. Enfant, B. a connu la détention à laquelle il ne croyait jamais survivre. Comme un mur infranchissable absolu, des épreuves inoubliables venues de l’enfance, de l’école et de la déportation, imposent leur image tyrannique entre sa bien-aimée et lui-même. L’épouse aimerait avoir un enfant ; B. s’y oppose. L’époux fait de son passé un voile immense qu’il ne veut pas voir se lever tandis que l’épouse tend à s’épanouir en se libérant d’une Histoire trop pesante et présente. Les bases de la culture européenne ont été mises à mal par les expériences tragiques de la Seconde Guerre mondiale. Comment la vie continuerait-elle dans le déni de soi et de sa propre histoire ? La catharsis est possible pourtant dans l’instant scénique de la représentation, grâce à la poésie de l’acte théâtral partagé avec le public.

Véronique Hotte

Naître à jamais de Andras Visky, mise en scène de Gabor Tompa, du 7 au 30 juillet 2009 à 21h au Théâtre des Halles, rue du Roi René à Avignon, tél : 04 32 76 24 51