La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Entretien

Michel Tremblay

Michel Tremblay - Critique sortie Théâtre
Crédit portrait : Joshua Kessler

Publié le 10 mars 2012 - N° 196

Eternel féminin

Germaine Lauzon, femme au foyer à Montréal, gagne un million de timbres GoldStar à coller dans le catalogue qui va lui permettre de se procurer des biens de consommation. Afin d’accélérer le collage des timbres, elle invite ses belles-sœurs à l’aider. Quarante ans après Les Belles-sœurs, pièce de Michel Tremblay qui révolutionna le paysage culturel et social du Québec, René Richard Cyr en propose une adaptation en musique et en chansons.

Qui sont les femmes de Belles-sœurs ?

Michel Tremblay : Ce sont des femmes du milieu ouvrier de Montréal, dans les années 60.

René Richard Cyr transforme votre pièce en théâtre musical, quarante ans après sa création. Pensez-vous que la condition féminine a changé depuis quarante ans ?

M. T. : La société a changé, c’est vrai, mais les individus moins. Chacune de ces femmes prise à part est encore pertinente aujourd’hui, même si l’ensemble de leur collectivité a évolué.

Pourquoi avez-vous écrit cette pièce ?

M. T. : J’ai écrit cette pièce en réaction au fait que le théâtre nord-américain du XXe siècle, à mon avis, était écrit par des hommes pour des hommes : les personnages féminins étaient souvent secondaires, utilitaires et comiques. J’ai voulu donner droit de parole aux femmes qui m’avaient élevé. J’ai aussi écrit cette pièce pour vérifier s’il était possible de se servir du joual (le vrai, pas l’aseptisé) au théâtre.

Pouvez-vous nous parler de cette langue si particulière que vous mettez dans la bouche de vos héroïnes ?

M. T. : Le joual a été inventé par les Montréalaises du milieu ouvrier du début du XXe siècle, quand les hommes sont partis travailler en anglais et ont ramené des mots anglais à la maison. Les femmes voulaient parler français et « traduisaient » phonétiquement les mots, inventant ainsi de véritables néologismes.

« Ce spectacle donne un nouveau souffle à la pièce. »

Illusion du bonheur matériel et rêve de gain soudain : pourquoi évoquer ces questions ?

M. T. : Il est important, je crois, de voir la racine de tout cela, ce concours où une compagnie de timbres-primes oblige une ménagère à coller un million de timbres, plutôt que de lui donner l’équivalent en marchandises. Cela est d’une grande cruauté et d’un grand mépris. Quinze grandes comédiennes parmi les meilleures du Québec font vivre cette histoire.

Ce spectacle est une adaptation en musique et en chansons des Belles-sœurs. Que pensez-vous qu’apporte cette nouvelle forme au premier spectacle ?

M. T. : Ce spectacle donne un nouveau souffle à la pièce : à cause de la musique, ce qui est drôle est plus drôle, et ce qui est triste est plus triste.

Propos recueillis par Catherine Robert


Belles-sœurs, théâtre musical, d’après Les Belles-sœurs, de Michel Tremblay ; livret, paroles et mise en scène de René Richard Cyr ; musique de Daniel Bélanger. Du 8 mars au 7 avril 2012 à 21h ; dimanche à 15h ; relâche le lundi, les 11, 15, 22 et 29 mars et le 5 avril. Théâtre du Rond-Point, 2bis, avenue Franklin D. Roosevelt, 75008 Paris. Tél : 01 44 95 98 21. En mars 2012, parution chez Actes Sud de La grande Mêlée, de Michel Tremblay.

A propos de l'événement


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