La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

L’Oiseau vert

L’Oiseau vert - Critique sortie Théâtre
Légende : « Les merveilleux sortilèges de l’Oiseau vert. »

Publié le 10 novembre 2010

Sur la scène enchantée de Sandrine Anglade, s’envole la magie épique de L’Oiseau vert de Gozzi, canevas filé d’improvisations et de commedia dell’arte, et revisité avec malice par Nathalie Fillon. Une bouffée d’air rafraîchissante.

Gozzi a toujours défendu dans son œuvre le pur toscan contre Goldoni qui ose alterner le parler populaire et la langue aristocratique dans des comédies mêlant les distinctions sociales. Pour Gozzi, seuls les poèmes satiriques ou burlesques peuvent s’écrire en vénitien. Le théâtre quant à lui, réserve les dialectes aux improvisations et aux masques. Par défi, Gozzi écrit à son tour une comédie sur un conte populaire, L’Amour des Trois Oranges (1761) ; il retrouve les joies de la commedia dell’arte et son parler vénitien gaillard. Le dramaturge trame dès lors des aventures extraordinaires avec des êtres fabuleux qui dictent à la jeunesse des épreuves initiatiques. L’Oiseau vert (1765) est créé avec bonheur par Sandrine Anglade, une comédie improvisée dont le héros ailé parle en alexandrins du haut de sa montagne alors que les rois et reines de palais, les jeunes princes ambitieux et le petit peuple de la rue s’expriment dans un registre courant, précieux ou vulgaire. Sur le plateau, règnent le plaisir sensuel de la danse des mots et l’ivresse des sentiments  – la haine, la jalousie. La bouffonnerie et le fantastique croisent le fer sur un fond de philosophie cultivé par deux jumeaux énigmatiques, un frère et une soeur élevés par un couple de charcutiers à la verve populaire. Les orphelins partent en quête de leur identité.
 
Des comédiens à la belle truculence et aux costumes colorés
 
Apprendre à vivre avec ses proches et avec soi-même : il n’existe pas d’autre philosophie, celle de l’oiseau sacré dont la liberté fréquente les régions célestes de l’esprit et de l’âme ou celle aussi de Calmon, statue de marbre et de morale pure. Le phénix se métamorphose en prince et résout les interrogations. Dans les régions terrestres, les hommes courageux vivent avec énergie et faconde bruyante. La scénographie de Claude Chestier dessine un cadre mobile de lumières fluo, se mouvant au gré des événements. La pièce centrale de la fresque est une nature morte, le royaume burlesque d’un dessous d’évier domestique. Portes de fer, micros sur pied, les acteurs chevronnés chantent en italien, de la ballade populaire aux tubes estivaux, de la ritournelle à la petite variété jusqu’aux jingles. Des comédiens à la belle truculence et aux costumes colorés, des figures grotesques de BD et de commedia dell’arte se partagent les scènes féeriques. Avec Pierre-François Doireau, Patrice Bornand, Laurent Montel, Christine Joly, Augustin de Monts, Priscilla Bescond, Emilie Gavois-Kahn, Thierry Mettetal, Damien Houssier, Jean-Paul Muel, Tania Tchénio. Un chœur d’interprètes aguerris pour une comédie joliment loufoque.
 
Véronique Hotte


L’Oiseau vert, de Carlo Gozzi ; texte de Nathalie Fillon, mise en scène de Sandrine Anglade. Le 5 novembre 2010 à la Ferme du Bel Ebat à Guyancourt, le 7 novembre au Théâtre de Suresnes, le 26 novembre à La Piscine de Châtenay-Malabry, les 16 et 17 décembre au Théâtre de Cachan. Vu au Théâtre des Sources à Fontenay aux Roses. Durée : 2h45

A propos de l'événement


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