La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Avignon / 2018 - Gros Plan

Les Monstrueuses

Les Monstrueuses - Critique sortie Avignon / 2018 Avignon Avignon Off. Le 11 • Gilgamesh Belleville
©Pierre François Leïla Anis dans Les Monstreuses

Le 11 • Gilgamesh Belleville / de Leïla Anis / mes Karim Hammiche

Publié le 22 juin 2018 - N° 267

Avec Les Monstrueuses, Leïla Anis poursuit sa belle recherche autour du féminin en exil. Mise en scène par Karim Hammiche, elle convoque toute une lignée de mères, de 1929 à 2008.

Depuis ses premiers pas d’auteure dans Pose ta valise (2010), où ses mots accompagnaient un chœur de femmes témoignant de leur exil, Leïla Anis a fait du chemin. Sa poésie du déracinement s’est épanouie. Son approche de l’entre-deux au féminin s’est affirmée. Dans Fille de (2013) déjà, mise en scène par Géraldine Bénichou, elle portait seule en scène sa propre prose autofictive avec une belle force. « Pour que l’arrachement serve à quelque chose, pour que ce qu’il y a de fou, d’insensé dans son exil, retrouve un sens ». Créé la saison dernière au Théâtre de Cachan, et joué entre autres à la Maison des Métallos à Paris, Les Monstrueuses s’inscrit dans cette quête. Cette fois mise en scène par Karim Hammiche, fondateur de la compagnie de l’Œil Brun dont elle est comédienne-auteure associée, elle met sa langue et sa présence singulières au service d’une passionnante traversée de l’Histoire des femmes au XXème siècle. D’un conte souvent cruel qui s’ouvre sur le malaise de la protagoniste principale – Ella, 30 ans en 2008 – le jour où elle apprend sa grossesse. Et qui se poursuit par une exploration labyrinthique de sa généalogie. Entre France et Yémen.

Toutes les femmes de Leïla

Leïla Anis ancre son récit dans un temps mythique. Celui de la « terre des femmes coupées » où « la lune rugit dans le noir ». Toutes les femmes qu’elle incarne dans Les Monstrueuses sont placées sous le signe de la légende. À commencer par Ella qui, sur son lit d’hôpital, revit des bribes d’existence de ses ancêtres. De ses arrière-grand-mères Jeanne et Zeïna notamment, nées et mortes la même année mais dans des pays éloignés. L’une en Occident, l’autre en Orient. Le divorce de Jeanne, la perte de sa fille Rosa et sa mort suite à une tentative d’avortement, la souffrance de Zeïna ou celle de Joséphine, mère d’Ella et fille de Rosa et Jean Paoli… Toutes ces tragédies qui ont marqué le passé de famille depuis 1929 ressurgissent chez la jeune femme tels des démons longtemps endormis. Mais toujours vivaces. Dans la bouche de Leïla Anis pourtant, ces fragments de récit ont la douceur d’après les cris. Car, conclut Ella à l’issue de son étrange voyage, « le monstre, c’est le silence ».

 

Anaïs Heluin

A propos de l'événement

Les Monstrueuses
du vendredi 6 juillet 2018 au vendredi 27 juillet 2018
Avignon Off. Le 11 • Gilgamesh Belleville
11 bd Raspail, Avignon

à 11h25. Relâche les 11 et 18 juillet. Tel : 04 90 89 82 63.

x

Suivez-nous pour ne rien manquer sur Avignon

Inscrivez-vous à la newsletter

x
La newsletter de la  Terrasse

Abonnez-vous à la newsletter

Recevez notre sélection d'articles sur Avignon en Scènes