Les Femmes savantes
Catherine Hiegel présente une mise en scène [...]
Guy Cassiers et Erwin Jans adaptent le roman d’épouvante de Jonathan Littell, en s’attachant à trois moments essentiels de l’histoire de Max Aue, officier SS banalement monstrueux. Pour un théâtre de la vigilance.
Voilà plusieurs spectacles que Guy Cassiers utilise l’histoire de l’Europe comme matériau théâtral, à travers l’analyse des discours qui s’y déploient et des forces sociopolitiques qui s’y affrontent. En choisissant d’adapter le roman de Jonathan Littell, il inscrit son engagement dans l’analyse des conditions qui conduisirent au génocide perpétré par les nazis. Supprimant les antécédents familiaux du héros et les références à l’Orestie (on sait que les Bienveillantes désignent, en français, les Euménides, Erinyes devenues vénérables après l’acquittement d’Oreste), l’adaptation scénique se concentre « sur des moments historiques importants, du massacre de Babi Yar, en passant par Stalingrad jusqu’au Berlin de 1945 ». Parmi tous les personnages historiques qu’évoque le roman, seul Eichmann demeure au théâtre : l’essentiel de la tension dramatique se noue autour de l’opposition entre la politique d’extermination que soutient ce dernier et le raisonnement « économiste » de Max Aue, le héros, qui « voit les juifs comme une main d’œuvre indispensable à l’Allemagne pour gagner la guerre ».
Questionner la responsabilité
Dans un spectacle qui évacue l’illustration historique trop appuyée et préfère le symbole à la reconstitution, Guy Cassiers entreprend un voyage dans le cerveau du héros de Jonathan Littell, en considérant que la question fondamentale posée par cette époque épouvantable est celle – transhistorique – de la responsabilité individuelle. « La question essentielle est de savoir comment est-il possible de se retrouver engagé dans une situation que peut-être on ne souhaitait pas. C’est la grande question du nazisme mais plus généralement la grande question d’aujourd’hui. Comment les femmes et hommes politiques semblent nous convaincre qu’il y a un danger venu de l’extérieur, un danger des cultures étrangères (…) On veut nous faire croire qu’on serait bien plus heureux sans ces étrangers qui nous contaminent. C’est un peu pour tous ceux qui croient que le génocide ne pourrait pas se reproduire que nous avons fait ce travail. », dit le metteur en scène.
Catherine Robert
Du jeudi au samedi à 19h30 ; dimanche à 16h. Tél : 01 48 70 48 90.
Catherine Hiegel présente une mise en scène [...]