Evelyne Pelletier interprète avec maîtrise et finesse « Les sept nuits de la reine » de Christiane Singer, dans la mise en scène de Philippe Lanton
Evelyne Pelletier interprète avec maîtrise et [...]
Habitué de la scène lyrique, Carmelo Agnello met en scène la première version de L’Echange, écrite par Claudel en 1894. Un quatuor pour tragédiens éclatants, en forme d’opéra symboliste.
La Marthe de Pauline Cheviller a la gravité déchirante d’une alto, face à Gvantsa Lobjanidze, qui interprète Lechy en soprano colorature. Les deux femmes s’affrontent autour de Louis Laine, à qui Sébastien Depommier offre la candeur d’un jeune premier au timbre de ténor. François Marais est en baryton pour jouer Thomas Pollock Nageoire, celui qui n’a ni l’insolence des aigus ni la force grondante des basses. Le comédien excelle à faire de ce capitaliste cynique le naïf de l’histoire, presque sympathique en son pragmatisme, face aux trois incendiaires sacrificiels qui l’entourent. Si Louis, Marthe et Lechy se consument en leur jusqu’au-boutisme, Thomas Pollock Nageoire est le seul à échapper au brasier, puisque le gain lui est aussi indifférent que la perte. L’histoire est connue : Louis Laine, sorte de huron ingénu, vit avec Marthe, sa jeune épouse française, dans la propriété de Thomas Pollock Nageoire, self made man américain, et de sa femme, l’actrice Lechy Elbernon. Entre le couple et les deux jeunes gardiens de leurs biens, se joue un échange hasardeux : Thomas Pollock Nageoire propose à Louis l’argent nécessaire pour fuir seul en lui laissant sa femme.
Comme les quatre cavités du cœur
Le brasier final qui emporte la maison de Thomas Pollock s’accompagne de l’anéantissement de toutes les spéculations. Ce qui relève de la grâce et du don ne s’obtient ni par la prière, ni par le calcul, ni par la menace : catholicisme solaire de Claudel ! Les décors de Romain Scrive et Arthur Lamon choisissent l’évocation d’un bord de mer : on est au bout du monde, avec l’océan comme seul horizon, sans les gloires lumineuses qui pourraient promettre une rédemption aux quatre malheureux. Pauline Cheviller est une Marthe sensuelle et tellurique, plus belle que ne le laisse entendre le texte, sublime et fougueuse dans son amour pour Louis Laine, que Sébastien Depommier campe habilement en Narcisse plus épris de lui-même que de celles qui se l’arrachent. Gvantsa Lobjanidze est la Lechy horripilante qu’impose son rôle, quintessence de l’actrice prisonnière de son image. François Marais ose un Thomas Pollock Nageoire distancié et presque amusant à force de flegme. Les comédiens font remarquablement sonner le texte de Claudel. Carmelo Agnello le transforme en partition aux subtiles modulations, explorant les affres du cœur humain en faisant entendre chacun de ses battements, de ses emballements et de ses crises.
Catherine Robert
Samedi et lundi à 19h ; dimanche à 15h. Tél. : 01 48 87 97 34. Durée : 2h45.
Evelyne Pelletier interprète avec maîtrise et [...]