La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Le Petit-Maître corrigé

Le Petit-Maître corrigé - Critique sortie Théâtre Paris Comédie-Française
Christophe Montenez et Adeline d’Hermy dans Le Petit-Maître corrigé. Crédit photo : Vincent Pontet

Comédie-Française / de Marivaux / mes Clément Hervieu-Léger

Publié le 24 janvier 2017 - N° 251

Clément Hervieu-Léger met en scène Le Petit-Maître corrigé dans un décor qui contraint les Comédiens-Français à des sauts et gambades et perturbe l’écoute en alourdissant une intrigue en soi assez poussive.

Les parents se sont entendus et les enfants doivent obéir. Le Comte, que son bon sens retient loin de Paris, et la Marquise, qui a élevé son fils dans les miasmes parisiens et la préciosité ridicule des « gens du bel air », ont décidé de marier leurs héritiers. Hortense la provinciale, authentique et sincère, et Rosimond, le « petit-maître », fat et superficiel, se rencontrent avant de convoler comme on s’y doit, à une époque et dans une classe sociale où le cœur ne décide pas des attachements. Mais Hortense, soutenue par Marton, sa suivante, veut être aimée de son époux, et exige que l’aveu scelle le contrat. Amusant choc des cultures que celui que brosse Marivaux par touches spirituelles et répliques assassines et drôles, couronné par une plaisante guerre entre les sexes, où les femmes, fines et bienveillantes, l’emportent sur les hommes, rendus bêtas par leur souci d’une vaine gloriole narcissique. La pièce de Marivaux, reléguée dans les oubliettes du théâtre après un four à sa création, est ressuscitée par Clément Hervieu-Léger, qui la met en scène comme une touchante comédie romanesque. N’étaient les magnifiques costumes de Caroline de Vivaise, qui installent les personnages entre Greuze et Chardin, on se croirait dans un mélodrame sentimental contemporain avec un gentil papa, une maman sévère, des copains serviables et une méchante punie à la fin…

 

L’amour est dans le pré

 

Les comédiens de la troupe du Français interprètent leur rôle avec un solide talent. Entre tous, Adeline d’Hermy brille en Marton, suivante spirituelle et retorse, dont le charme et le bagout remettent les hommes sur le chemin vertueux de la fidélité amoureuse. Eric Ruf invente une scénographie d’inspiration maritime, dont la beauté accueille comme un écrin les personnages à l’allure déliée. On pense davantage aux tableaux de Monet où des élégantes à ombrelles folâtrent dans les graminées, qu’à Hubert Robert, qui inspire l’agencement du décor. La dune escarpée limite l’espace de jeu à l’avant-scène. Les comédiens y grimpent et en descendent avec une obstination pour l’escalade qui finit par lasser. Les allers et retours incessants entre le sommet et le creux de la dune, où Hortense a installé son nécessaire à dessin, les agaceries dans les oyats et les glissades dans le sable impriment un caractère répétitif à l’intrigue, et empêchent une écoute efficace du texte. Celui-ci finit par patiner, autant que les atermoiements vicinaux des personnages, et on en vient à considérer que la correction infligée au petit-maître est un peu languide… Mais tout est bien qui finit bien et l’amour l’emporte, comme dans une bluette de fin d’été dont la soirée s’étire en longueur…

 

Catherine Robert

A propos de l'événement

Le Petit-Maître corrigé
du samedi 3 décembre 2016 au mercredi 26 avril 2017
Comédie-Française
1 Place Colette, 75001 Paris, France

Comédie-Française, salle Richelieu, place Colette, 75001 Paris. Du 3 décembre 2016 au 26 avril 2017. Matinées à 14h, soirées à 20h30. Tél.: 08 25 10 16 80. Calendrier sur www.comedie-francaise.fr

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