Raki
La compagnie Libre d’Esprit présente les deux [...]
Salle Richelieu, le metteur en scène Clément Hervieu-Léger crée une version vibrante du Misanthrope de Molière. Entre hauteur de l’évocation théâtrale et puissance de l’incarnation.
Mystère et force de l’invisible. Voici les termes qui viennent à l’esprit au sortir du Misanthrope mis en scène par le pensionnaire de la Comédie-Française Clément Hervieu-Léger. Mystère de l’humain, d’abord, qui s’incarne sur le plateau de la salle Richelieu à travers toutes sortes de teintes, de nuances, donnant naissance – dans une vérité elle aussi mystérieuse – aux fulgurances, aux mouvements de la vie. Force de l’invisible, ensuite, de ces choses qui s’imposent, impressionnent, en gardant leur part d’énigme : impact d’un regard, d’un geste, grâce d’un corps à corps, résonances d’un temps, réverbération d’un silence. Clément Hervieu-Léger ne réduit pas le théâtre à un principe, une mécanique ou une idée. Il fait surgir sur scène des espaces-temps d’une profondeur et d’une justesse surprenantes. On se souvient de ses premiers pas en tant que metteur en scène de théâtre (La critique de l’Ecole des Femmes de Molière, en 2011, au Studio-Théâtre de la Comédie-Française ; L’Epreuve de Marivaux, en 2012, spectacle créé à la Scène nationale Evreux-Louviers, puis présenté au Théâtre de l’Ouest Parisien). Ces propositions fortes, inspirées, contenaient déjà toute l’évidence que l’on retrouve, aujourd’hui, dans ce Misanthrope.
Les fulgurances, les mouvements de la vie
Une évidence qui n’a rien de polie ou de prévisible. Quelques aspects de cette mise en scène pourront même, c’est possible, irriter certains spectateurs. Une manière de lenteur qui fait se prolonger certaines scènes, leur conférant une dimension parfois chorégraphique, parfois opératique, parfois cinématographique. Une propension à la noirceur, qui agit comme un voile, venant atténuer l’emprise de la comédie… Mais rien de tout cela ne tombe jamais dans la futilité ou la complaisance. Touche par touche, faisant preuve d’une grande maîtrise des moyens et des enjeux de la pièce, Clément Hervieu-Léger crée un spectacle vibrant, sensuel, sensible. Au sein d’un espace monumental dans lequel on entre et sort de toutes parts (la scénographie est d’Eric Ruf, qui interprète également le rôle de Philinte), Loïc Corbery (Alceste), Georgia Scalliet (Célimène), Florence Viala (Arsinoé), Adeline d’Hermy (Eliante), Serge Bagdassarian (Oronte), Louis Arene (Acaste), Benjamin Lavernhe (Clitandre), Yves Gasc (Basque) et Gilles David (Du Bois) sont les remarquables protagonistes de ce Misanthrope tout en finesse, tout en intelligence.
Manuel Piolat Soleymat
Du 12 avril au 17 juillet 2014. En alternance. Matinées à 14h, soirées à 20h30. Durée de la représentation : 2h45 avec entracte. Tél. : 0825 10 16 80 (0,15 € la minute). www.comedie-francaise.fr
La compagnie Libre d’Esprit présente les deux [...]