La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Le Jeune Prince et la vérité

Le Jeune Prince et la vérité - Critique sortie Théâtre
Un prince oriental porté au sublime par un conteur d’aujourd’hui.

Publié le 10 décembre 2008

Au fait des métissages culturels dans sa ville de Stains, Marjorie Nakache s’en remet au conte oriental de Jean-Claude Carrière pour parcourir la planète et ses hommes en quête inlassable d’absolu.

Des malles, des bagages, des enchevêtrements de comédiens et de marionnettes, il n’en fallait pas plus pour imaginer la caverne d’Ali-Baba, à la façon de Marjorie Nakache. La metteuse en scène a trouvé un plaisir savoureux à concevoir dans l’audace un chez-soi onirique, un bric-à-brac de paysages illuminés et de rêves accumulés, une pure invention décalée et muséale, à la fois sombre et lumineuse, comme la vie qui coule entre le blanc, le noir et les couleurs de nos jours changeants. Sur le plateau, un horizon catastrophique de monts et de montagnes, juchés dans le désordre au-dessus de vallées et de villages miniaturisés, semble être prêt à s’effondrer ou bien à glisser jusqu’aux pieds du public. Cette fresque scénique esquissée à partir du Jeune Prince et la vérité de Jean-Claude Carrière met en scène un jeune maître d’Orient, une jolie marionnette de figure princière, portée par le conteur, la comédienne Pauline Delerue en blouson de cuir et lunettes de motard sur la tête. Le baroudeur trash et maladroit de nos temps modernes en a vu d’autres, il manque toutefois pour parfaire son éloquence un bon âne qui répondrait à la tradition classique de sa posture : il est destiné à parcourir la terre entière à la recherche d’on ne sait quelle raison.

Transformations, métamorphoses et merveilleux, l’homme change

C’est afin de porter son jeune maître vers des pays et des contrées inconnus puisqu’il doit trouver la vérité pour épouser sa dulcinée, selon la dure loi paysanne du père. Le duo croise sur sa route initiatique un échantillon de figures humaines, patrons, vagabonds, juges, plaignants, faux amis et imbéciles, marionnettes ou comédiens, comme Xavier Marcheschi, Sonja Mazouz, Marjorie Nakache et Béatrice Ramos. La planète dispose d’une multiplicité de reflets que nous retrouvons en nous-mêmes quand nous les cherchons si loin. Transformations, métamorphoses et merveilleux, l’homme change, il n’est pas une donnée définitive car le temps est un maître formateur accompli. Où se trouve la vérité ? Ni dans les châteaux, ni dans les palais, ni dans les églises, ni dans les étoiles. Seul le vieil homme sage apporte une réponse énigmatique au jeune homme : « Écoute-moi et n’oublie jamais ce que je vais te dire. Il faut toujours suivre ceux qui cherchent la vérité. Et toujours fuir ceux qui l’ont trouvée. » La réflexion porte ses fruits, et c’est au milieu de la danse hétéroclite des objets, des marionnettes et des corps d’acteurs épanchés que le monde convoité se reconstruit. Un enchantement.

Véronique Hotte


Le Jeune Prince et la vérité

de Jean-Claude Carrière, mise en scène de Marjorie Nakache, du 17 au 21 décembre 2008, les 17, 18 et 19 à 14h, les 17, 19 et 20 à 20h15, le 21 à 16h au Studio-Théâtre de Stains 19, rue Carnot 93- Stains Tél : 01 48 23 06 61 studio_theatre@yahoo.fr www.studiotheatrestains.fr Texte publié à Heyoka Jeunesse/Actes Sud-Papiers. Pièce vue au Festival off/Avignon 2008.

A propos de l'événement


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