La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Jazz / Musiques - Gros Plan

La Voix est libre !

La Voix est libre ! - Critique sortie Jazz / Musiques
LÉGENDE PHOTO © Caroline Pottier: André Minvielle, bon pied belle oreille.

Publié le 10 mai 2012 - N° 198

Des lendemains en chantier : « L’ordre parfait est stérile, le désordre contrôlé est créatif. » Pour sa dixième édition le joli rendez-vous de mai cite en guise de cap à suivre l’astrophysicien Trinh Xuan Thuan, qui lie jazz et physique quantique.

Un horizon éclaté, telle est la marque de fabrique de La Voix est Libre, à l’heure du premier bilan. Selon son fondateur, l’alchimiste Blaise Merlin, le festival est passé « du rôle de « repaire oblique » à celui de « repère public ». » Pourtant, malgré le succès, rien ne semble joué. « Il faut se lever tôt et se coucher très tard, pour arriver à poursuivre ce combat sans y laisser son âme et sa joie initiales. Les pouvoirs publics ne semblent pas encore prêts à se laisser le champ libre à des formes de création et de diffusion innovantes, sensibles aux surgissements et aux tremblements d’un paysage culturel en pleine mutation. Face aux critères esthétiques et économiques abscons de systèmes à bout de souffle, nous opposons la joie, l’invention et la vitalité vécues depuis dix ans dans notre festival, où la prise de risque est pourtant totale ! » Plutôt que de la mettre en veilleuse, La Voix est Libre choisit de l’ouvrir toujours plus fort, quitte à heurter les oreilles mal débouchées. « Entre une uniformisation à marche forcée et les replis identitaires qu’elle provoque en retour, il existe une zone de « libre-étrange », une infinité de trajectoires et de rencontres qu’il est urgent de laisser s’épanouir, sans quoi la notion même de « libre expression » se verrait peu à peu vidée de sens… et d’expressivité ! »  

Insurrection joyeuse

« L’humanité sera poly-gammes, ou ne sera pas ! » Tel est le pari des quinze spectacles dont six créations de ces trois soirs aux intitulés éminemment poétiques. Tout d’abord : « Rencontres du troisième tour », avec le paléoanthropologue Pascal Picq en ouverture d’une soirée où se croiseront (entre autres) les textes du Congolais Dieudonné Niangouna, la danse du Nigerian Qudus Onikeku, la contrebasse de Joëlle Léandre, des chants venus de Mongolie et le fantasque Fantazio. Ensuite :  « Des Contes, des Voix », avec l’impayable Mederic Collignon, L’Argent nous est cher du tromboniste Yves Robert et un trio sur lequel il faut miser : le chorégraphe Boris Charmatz, le poète Saul Williams et le souffleur Peter Corser ! Enfin Le Corps Elect’Oral, soit une kyrielle de voix mêlées à des contextes des plus variés, de l’électro Carawane (d’après Hugo Ball) au trio entre le scatteur au verbe haut André Minvielle, le slalommeur entre les maux Arthur Ribo et le débatteur percussif Benjamin Sanz. « Le festival est né entre les deux tours des présidentielles de 2002, dans un climat où l’on a tous ressenti la nécessité de vivre des moments de joie et de liberté essentiels face aux limites, aux mensonges et aux catastrophes d’un système basé sur un modèle unique de production et de diffusion, qu’il soit culturel, agriculturel, économique ou religieux. Cette ambiance d’insurrection joyeuse, aussi électrique qu’éclectique, a continué à enflammer nos soirées. En 2007, nous avions organisé le festival la veille, le lendemain et le surlendemain du second tour des présidentielles en invitant Édouard Glissant, qui, en plein débat sur l’identité nationale, résumait les choses ainsi : « Nous devons enfin comprendre que notre unité passe par une infinité de diversité, et il faut les assumer toutes ». » Ce n’est qu’un début, continuons les ébats !

Jacques Denis


Jeudi 10, vendredi 11 et samedi 12 mai à 20 h 30 aux Bouffes du Nord. Tél. 01 46 07 34 50.

A propos de l'événement

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