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Théâtre - Festival

Krzysztof Warlikowski (« Angels in America I & II »)

Krzysztof Warlikowski (« Angels in America I & II ») - Critique sortie Théâtre

Publié le 10 juin 2007

Angels in America I & II :  Embrasser le monde et la réalité de façon directe et excentrique.
Déclarant travailler avant tout pour le public qu’il connaît le mieux – le public polonais -, Krzysztof Warlikowski a souhaité confronter la société catholique et conservatrice de son pays à l’homosexualité, à la culpabilité et aux mensonges d’une Amérique reaganienne frappée de plein fouet par le sida.

En quoi ce diptyque de Tony Kushner vous semble-t-il porteur d’une matière susceptible d’ébranler, aujourd’hui, le public polonais ?

Krzysztof Warlikowski : Par rapport aux pièces classiques, et notamment aux pièces de Shakespeare sur lesquelles j’ai beaucoup travaillé, la voix de Tony Kushner me semble sans doute plus directe, plus immédiatement engageante. Car il se trouve qu’aujourd’hui on a en quelque sorte assimilé Shakespeare, même si l’on ne sait probablement pas encore tout ce qui se cache derrière ses textes. Alors que la parole d’un auteur comme Tony Kushner, un auteur juif et homosexuel, apparaît aujourd’hui en Pologne comme une parole tout à fait excentrique, marginale, provocatrice. Et c’est précisément la raison pour laquelle j’ai eu envie de mettre en scène Angels in America : pour secouer le public polonais, lui permettre d’entendre un autre discours que celui de l’Eglise catholique, omniprésente en Pologne, pour mettre en évidence les dangers de cette connivence qui se joue entre la religion et les hommes politiques polonais.


« J’ai eu envie de mettre en scène Angels in America pour secouer le public polonais. »

Votre projet s’inscrit-il donc davantage dans un cadre politique que dans une forme de travail sur l’intime et sur l’individu ?

K. W. : Non, mon projet est vraiment d’investir l’ensemble des perspectives d’Angels in America, qui sont nombreuses. Il me semble que peu de textes contemporains font preuve d’une telle amplitude. Il s’agit à la fois d’un propos sur la politique, sur le religieux, sur l’individu, sur le groupe, sur le couple, sur l’homosexualité, sur l’hétérosexualité, sur la faute, sur le pardon, sur la peur, sur le mensonge, sur la mort… Cette ambition d’embrasser le monde et la réalité de façon complète, absolue, correspond totalement à ce que j’ai toujours essayé de faire, en tant que metteur en scène. Car dire des histoires pour dire des histoires, cela ne m’intéresse pas. J’aime qu’au théâtre chaque mot représente toujours quelque chose de nouveau, de significatif, d’important.

Quelle est, selon vous, la meilleure façon d’aboutir à cela ?

K. W. : Je pense qu’il faut dialoguer le plus directement possible avec le public. Ce qui m’intéresse dans la pièce de Tony Kushner, ce n’est évidemment pas de raconter une saga, mais bien de faire en sorte que chaque scène, faisant partie d’un ensemble, existe également pour soi et en soi, que chaque scène veuille réellement dire quelque chose. Pour cela, j’essaie de faire naître un univers mental, un univers plus intérieur qu’extérieur qui, plongeant ses racines dans le corps des comédiens, parvienne à rendre le sens du texte, à éclairer ses situations tout en échappant au réalisme.

A propos de l'événement

Avignon 2007

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