Julie Brochen
La jubilation d’une langue.
Julie Brochen s’engage avec Variations/Jean-Luc Lagarce dans de nouvelles Paroles d’Acteurs (Festival d’Automne et ADAMI). Après Joël Jouanneau et Martin Crimp en 2006, c’est à la directrice de L’Aquarium d’honorer à son tour la tradition de transmission orale dévolue à de jeunes comédiens. Un pari stimulant.
Comment avez-vous élu Lagarce comme écrivain associé ?
J. B. : Je n’ai jamais eu la joie de jouer ou de mettre en scène ces textes dont je me sens proche. À l’origine, je voulais me situer là où étaient les acteurs dans un échange réciproque. Je voulais découvrir avec eux une écriture qui m’était inconnue. Nous avons privilégié deux pièces de Lagarce, Derniers Remords avant l’oubli et Juste la fin du monde avec quelques bribes de Music-Hall. J’ai eu envie de « piocher » sans que je ne tisse pour autant de patchwork. L’écriture de Lagarce résiste au montage et aux coupes ; elle est musicale, ouverte aux résonances et aux répétitions. Si on enlève des répliques, on perd la saveur et la densité de l’écriture.
« Le repas de famille chez Lagarce, une sorte de Festen théâtral »
La lecture passionnée de l’œuvre m’a conduite à regretter de n’avoir pas connu son auteur. Même si cette écriture est très française, je ne peux m’empêcher de la rapprocher de la voix de Tchékhov.
Vous n’hésitez pas à parler à cet égard, de partition musicale.
J. B. : Lagarce est un auteur intéressé par les acteurs ; il leur donne un texte très écrit, un travail jubilatoire de la langue, comme celle de Tchékhov. J’ai eu, du vivant de Lagarce, une précaution spontanée à penser que l’auteur n’est pas forcément le plus habilité à mettre en scène ses propres textes. De plus, Lagarce avait ses amis et j’avais la sensation de ne pas appartenir à cette famille. Aujourd’hui, je vais privilégier des instants de l’œuvre en restant à l’affût de ce que sont ces jeunes acteurs, de leurs affinités et de leur point d’achoppement avec le texte. Avec aussi le désir d’enclaver Derniers Remords avant l’oubli dans Juste la fin du monde en prenant appui sur le repas de famille, une sorte de Festen théâtral. Les jeunes apprentis, le public accueilli et moi-même, sommes conviés à un repas Lagarce.
Propos recueillis par Véronique Hotte
Textes de Jean-Luc Lagarce, mise en scène de Julie Brochen, du mardi au samedi 20h30, dimanche 16h, du 6 au 11 novembre 2007 au Théâtre de l’Aquarium Cartoucherie 75012 Paris Tél : 01 43 74 99 61 et Festival d’Automne : 01 53 45 17 17 www.festival-automne.com