La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Je t’ai épousé par allégresse

Je t’ai épousé par allégresse - Critique sortie Théâtre
© Pascal Gély Les jeunes mariés invitent belle-maman à déjeuner.

Publié le 10 février 2009

L’historiette de Natalia Ginzburg, certes bien portée par Valeria Bruni-Tedeschi, reste anodine.

Quelle histoire ! A peine se connaissaient-ils depuis un mois qu’ils s’épousaient en douce, déjouant d’un coup frondeur les bienséances familiales et les prolégomènes amoureux. Les voici, une semaine après leurs noces intimes, au petit matin pluvieux d’une nouvelle vie, dans la pagaille indécise d’un quotidien à inventer à deux. Giuliana, jolie fille sans le sou, venue de sa campagne avec des rêves d’actrice plein la tête, a traîné une existence bohème, vivotant de petits emplois, avant de s’amouracher d’un écrivain raté. Pietro, bel homme, fils de bonne famille et avocat cossu, a grandi dans les murs amidonnés du conformisme bourgeois. Une rencontre lors d’une soirée d’ivresse chez un ami peintre et leurs destins se scellaient. « Pourquoi nous sommes-nous mariés à toute allure? Pourquoi nous sommes-nous précipités? » répète-t-elle sans cesse maintenant. Pour l’argent, lui dit-elle. Et puis parce qu’elle aurait épousée n’importe qui pour se sortir de la déprime et de la misère. Par allégresse, répond-il.
 
Milieu bourgeois des années 60
Giuliana parfois laisse éclater des sursauts de violence, déchargés d’un trait sec puis amadoués d’un sourire désemparé. Elle cherche querelle, comme pour mieux sonder le pourquoi de leur union, retourne la peau des mots pour les mettre en travers d’eux. Ce dialogue chargé d’ambiguïtés et de complexes mal refoulés s’égare cependant vite dans une comédie poussiéreuse, quand s’en mêlent la petite bonne, bien dégourdie, la mère de Pietro, catho réac passablement névrosée, et sa sœur, vieille fille gentiment béate. Où il est question de convenances, de mésalliance, d’Eglise bien sûr, mais aussi de menu du déjeuner, de servante sans manière et autres scandales domestiques. Valeria Bruni-Tedeschi a beau vouloir creuser des ombres au cœur de la banalité, glisser des caches secrètes au fond d’elle, l’historiette s’enferre dans l’écriture bien terne de Natalia Ginzburg (1916-1991) et reste insignifiante. La romancière et essayiste italienne situe la pièce au siècle dernier, dans la Rome des années 60. Les enjeux de ce mariage anticonformiste et des codes bourgeois paraissent aujourd’hui terriblement datés. Quant à la mise en scène de Marie-Louise Bischofberger, elle colle au texte et se coule mollement dans une esthétique de chic standard. Valeria Bruni-Tedeschi oscille avec subtilité de l’emmerdeuse volubile à la mélancolique fantasque, face à Stéphane Freiss, qui joue le physique de l’emploi. Autour d’eux, Edith Scob (la mère), Armelle Bérengier (la sœur) et Marie Vialle (la bonne) forcent le jeu pour donner le ton de la comédie. Quelle histoire vraiment…

Gwénola David


Je t’ai épousé par allégresse, de Natalia Ginzburg, mise en scène de Marie-Louise Bischofberger, à 21h, sauf samedi à 18h30 et 21h, dimanche à 15h, relâche lundi, au Théâtre de la Madeleine, 19 rue de Surène 75008 Paris. Rens. 01 42 65 07 09 et www.theatredelamadeleine.com.  Durée : 1h30.

A propos de l'événement


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