7 minutes, de Stefano Massini, mise en scène de Maëlle Poésy
Avec sa mise en scène de 7 minutes de Stefano [...]
Pauline Bayle adapte et met en scène la deuxième partie d’Illusions perdues avec une maestria époustouflante, qui l’installe définitivement parmi les meilleurs. Un chef d’œuvre, à voir absolument !
En octobre 1917, Proust disait, dans une lettre à René Boylesve, son « admiration infinie » pour Illusions perdues. Un siècle plus tard, Pauline Bayle signe une version théâtrale de ce roman qui provoque le même enthousiasme ! Après avoir déjà très largement prouvé son intelligence de l’adaptation et sa maîtrise de la mise en scène en portant la geste homérique au plateau, Pauline Bayle récidive avec le récit de l’ascension, du triomphe et des déboires de Lucien de Rubempré. Elle réussit un spectacle d’une force, d’une beauté, d’une tenue et d’une qualité dramaturgique exceptionnelles. Voilà une pièce qui mérite des spectateurs très nombreux tant elle réussit à lier une insolente audace artistique à une accessibilité totale. L’excellence à la portée de tous : peu d’artistes méritent une telle estampille ! Charlotte Van Bervesselès, Hélène Chevallier, Guillaume Compiano et Alex Fondja se partagent les seconds rôles autour de Jenna Thiam, qui joue Lucien, sur un vaste plateau nu où il suffit de quelques chaises pour faire surgir la conférence de rédaction de Finot, et d’une petite estrade pour faire renaître la scène du Panorama-Dramatique où Coralie séduit Lucien.
Le meilleur de Balzac, et plus encore !
Le théâtre, « trône de l’illusion », disait Balzac : rarement plus brillants princes l’ont occupé que les cinq complices de cette exploration des heurs et malheurs d’un poète de province monté à Paris pour y conquérir la gloire et se brûler les ailes… Alex Fondja, poignant dans la vertu adamantine de Daniel d’Arthez, Guillaume Compiano, bouleversant et inquiétant en Camusot blessé, Charlotte Van Bervesselès, déchirante dans la scène où Coralie tombe sous les quolibets, Hélène Chevallier, géniale en Bargeton prétentieuse, sont tous également éblouissants dans le passage d’un rôle à l’autre, pendant que Jenna Thiam, en marathonienne de l’émotion, campe un Lucien dont la naïveté oscille entre veulerie et sensualité, hardiesse et arrogance. « Balzac, grand, terrible, complexe aussi, figure le monstre d’une civilisation et toutes ses luttes, ses ambitions et ses fureurs. » disait Baudelaire. L’ascension et la chute de Rubempré se passe sous la Restauration. Serait-ce parce que cette période se termina par les Trois Glorieuses ou seulement parce qu’elle se caractérisa par le règne des petits esprits, étriqués, mesquins, égoïstes et médiocres : toujours est-il que ce que décrit Balzac résonne étonnamment à notre époque. L’actualité du propos est stupéfiante et le choix des costumes, du phrasé et de la gestuelle contemporaine renforce cette évidence. « C’est l’œuvre capitale dans l’œuvre » disait Balzac à Madame Hanska à propos d’Illusions perdues. De cette œuvre capitale, Pauline Bayle et les siens font un chef-d’œuvre !
Catherine Robert
Du 13 au 18 septembre 2021 à 20h, du 20 septembre au 16 octobre à 21h, relâche le dimanche. Tél : 01 43 57 42 14. Spectacle vu à l’Espace 1789 de Saint-Ouen. Durée : 2h30.
Avec sa mise en scène de 7 minutes de Stefano [...]