La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

La saison classique en France - 2009

Un chef d’orchestre décalé

Un chef d’orchestre décalé - Critique sortie

Publié le 2 octobre 2009

Rares sont les chefs qui enregistrent un jour un disque avec le Royal Philharmonic Orchestra de Londres et le lendemain mènent un projet d’ orchestre de jeunes en banlieue parisienne. Atypique et passionnant, Dionysios Dervis-Bournias semble ne détester qu’une chose : la routine et le conformisme – comme le prouve encore son dernier projet, consacré à Bach joué sur instruments modernes mais avec les acquis de la révolution baroque.

Quel parcours avez-vous accompli pour devenir chef d’orchestre ?
Dionysios Dervis-Bournias :
J’ai mené une carrière de guitariste classique qui m’a amené à enregistrer pour Philips et jouer sous la direction de Vladimir Ashkenazy. Mais le répertoire de l’instrument est trop limité et depuis tout petit, je rêvais de devenir chef d’orchestre… J’ai donc décidé, à 30 ans, de prendre un virage à 180° : arrêter la guitare et me consacrer uniquement à la direction. Georg Solti qui connaissait mon travail de chef m’a beaucoup soutenu. Semyon Bychkov aussi dont j’ai été l’assistant à l’Orchestre de Paris… En parallèle, j’ai aussi travaillé à Birmingham avec Simon Rattle.

Avez-vous été attiré par le mouvement sur instruments anciens ?
D.D.-B. :
J’ai été particulièrement marqué par Reinhard Goebel, qui a à la fois une connaissance encyclopédique et une musicalité incroyablement vivante. Mais ce qui m’intéresse, c’est de faire de la musique baroque sur instruments modernes. A mon sens, il est presque impossible d’acheter dix violons et dix archets de qualité de l’époque précise de l’œuvre. Je préfère donc des instruments modernes à de mauvais instruments historiques.

« Le slogan de notre orchestre Arca XXI est simple : de la musique dite difficile dans des banlieues dites difficiles. »

Où vous conduit votre carrière de chef invité aujourd’hui?
D.D.-B. :
Suite à une invitation de Mezzo, j’ai dirigé récemment l’Orchestre Philharmonique de Prague. Et puis je viens de commencer une passionnante collaboration avec le Royal Philharmonic Orchestra de Londres. Je viens d’enregistrer avec cette phalange un disque consacré à René Maillard (Grand Prix de Rome en 1955) dont l’œuvre remarquable a été redécouverte par Nicolas Bacri. Avec cet orchestre, je vais également diriger un programme Beethoven en avril prochain.

Vous avez aussi créé votre propre orchestre : Arca XXI. Quelle est sa spécificité ?
D.D.-B. :
Composé de jeunes musiciens, cet orchestre joue les musiques des XVIIIème et XXIème siècles. D’un côté, la musique de Bach à Mozart, interprétée dans l’esprit historique et de l’autre, une politique de commandes à des compositeurs d’aujourd’hui. Nous souhaitons être le premier orchestre en résidence en banlieue. Notre slogan est simple : de la musique dite difficile dans des banlieues dites difficiles. L’orchestre a aussi pour particularité de jouer en jeans et en baskets.

Propos recueillis par A. Pecqueur

Dionysios Dervis-Bournias vu par la pianiste Brigitte Engerer :

« J’ai été complètement convaincue par le travail que nous avons fait ensemble sur les concertos de Bach, par sa manière éminemment “moderne” de jouer cette musique, en lui enlevant ce côté pompeux que j’ai connu dans ma jeunesse. Sa vision est formidablement dynamique et vivante. Je peux dire qu’il m’a emmenée sur d’autres chemins dans la connaissance de Bach en m’ouvrant de nouveaux horieons dans l’interprétation avec un travail  sur les phrasés, sur les tempi, sur les voix… Cela a représenté  une ouverture et je ne peux plus, depuis notre travail en commun, imaginer de jouer Bach dans une autre direction que cette lecture baroque. Il a vraiment une grande connaissance de cette période de la musique, de Bach à Mozart. »


et par Reinhard Goebel chef d’orchestre :

« Aussi longtemps que nous ferons de la musique ancienne, la profession de musicien nécessitera d’être liée avec celle de l’historien. Dionysios Dervis-Bournias est le contraire d’un jeune chef qui se contenterait d’agiter les bras en l’air dans tous les sens. En premier lieu, c’est quelqu’un qui travaille avec sa tête : avant de se demander ce qu’il ressent, il essaie toujours de trouver des réponses à la question de savoir ce que le compositeur a pu penser et de quelle manière celui-ci est lié à l’esthétique de son temps. »

Contact : dervis-bournias@wanadoo.fr

 

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