Un voyage en partage
Rencontre avec la directrice du CCN de Nantes [...]
Une utopie qui se confronte au réel
Le nouveau directeur du Centre Chorégraphique National de Caen milite pour la reconnaissance du chorégraphique au cœur des territoires.
« L’outil CCN a été développé en même temps que le travail artistique de leurs « fondateurs », qui étaient des représentants de la nouvelle danse française. Les missions des CCN ont donc grandi avec ces chorégraphes. Notre génération, qui accède aujourd’hui à la tête de ces Centres Chorégraphiques, a d’abord évolué en compagnies. On se retrouve donc en situation d’apprentissage, avec en même temps l’envie de transformer les dispositifs, les équipes, et la façon de penser le lieu. C’est très intéressant, puisqu’en fin de compte on arrive avec un regard un peu naïf et neuf, pour mettre en place un projet que l’on a inventé, et, très vite, on se confronte aux défis de la mise en œuvre : comment réaliser et concrétiser un projet face à la réalité d’un territoire ? On part d’une utopie, d’un projet fantasmé, qui est une sorte de projet politique, esthétique, culturel, que l’on adapte au réel. C’est intellectuellement passionnant. Pour cela, on doit prendre en compte un certain nombre de facteurs, économiques, territoriaux ou historiques. Le budget, par exemple, pour des maisons qui ont développé énormément de missions annexes, mais avec une enveloppe d’accueil-studio qui n’a pas évolué depuis 1998 !
Un espace à partager
La problématique est l’enjeu financier, l’argent que les politiques allouent la danse. L’histoire du lieu est aussi importante, on n’arrive pas au Ballet du Nord comme à Rennes ou à Caen, ou après Jean-Claude Gallotta et trente ans d’implantation à Grenoble ! J’ai choisi d’inventer à Caen un espace qui est à partager, avec cinq artistes-compagnons, pour y développer des projets qui sont en lien avec le citoyen, avec l’hôpital, l’école, la prison…, et aussi des créations avec les habitants, pour développer la présence de la danse non pas sur de l’événementiel, mais sur du long terme. J’ai la sensation que, peut-être, l’un des endroits où l’on peut gagner du terrain par rapport au politique, c’est en imaginant des endroits de visibilité pour la danse, qui, sans s’inscrire dans quelque chose de spectaculaire, créent des sortes de poches d’infusion sur le territoire, avec un certain type de projets. Les CCN peuvent travailler à la reconnaissance et à la nécessité de la danse dans une société. Le projet pour Caen est essentiellement une utopie, sinon on ne poserait pas de projet. C’est un enjeu pour l’équipe de mettre en place si possible un lieu d’accompagnement des artistes, du public, et des citoyens, un lieu d’émancipation intellectuelle pour tous. »
Propos recueillis par Nathalie Yokel
Centre Chorégraphique National de Caen en Normandie, Halle aux Granges, 11 rue du Carel, BP 75411, 14054 CAEN cedex 4. Tél. : 02 31 85 83 94 / info@ccncbn.com.
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