La formation théâtrale en France
S’ouvrir à de multiples interprétations dans l’écriture contemporaine
Michel Dubois, une des figures de la décentralisation théâtrale, intervient
dans le cursus scolaire de l’Ecole Départementale de Théâtre (EDT 91) à
Corbeil-Essonnes comme metteur en scène des travaux des élèves de dernière
année.
Quel a été votre propre parcours de formation ?
Michel Dubois : En ce qui me concerne, je sais tout ce que je dois à
l’Ecole du CDE de Strasbourg (aujourd’hui TNS). J’ai été élève des toutes
premières années de cette école déjà exemplaire où, en parallèle avec la
formation elle-même, était transmise l’éthique propre au travail de
décentralisation si important dans les années 1960/1990. Ce double enseignement
est aujourd’hui encore au c’ur de mes travaux et réflexions sur notre art.
Quelle place avez-vous jusqu’alors accordée à la formation ?
M. D. : La formation destinée à des jeunes acteurs a été essentielle
au Centre Dramatique National ? Comédie de Caen où, entre 1982 et 1996 (ma
dernière année de direction de ce théâtre), nous avons élaboré des « ateliers de
recherches et de formations » qui ont eu une forte implication dans certaines
créations du CDN et dans la composition de son groupe d’acteurs permanents.
Accroche : « Diriger un atelier de formation c’est se mettre soi-même en
apprentissage. »
Quelles sont les qualités que vous attendez de vos élèves ? Comment les
choisissez-vous ?
M. D. : Je ne suis pas qualifié pour aborder toutes ces données car je
ne suis à l’origine ni du recrutement des élèves ni du projet pédagogique à l’EDT
91. Je ne suis à Corbeil que pour mettre en place (et non en scène) le dernier
atelier du groupe en phase terminale de formation. Le choix s’est porté sur un
auteur contemporain aujourd’hui très remarqué, l’Anglais Howard Barker. Les
13 Objets de Barker que les élèves travaillent en ce moment avec moi
permettent de montrer à leurs futurs employeurs la complexité des ouvertures
d’interprétation qu’on exige des acteurs et actrices aujourd’hui dans la
découverte des écritures théâtrales de ces dernières années. Avec des auteurs
tels que Barker, des chemins nouveaux s’ouvrent à l’action dramaturgique, à ce
que je nommerais pour simplifier une nouvelle responsabilité du théâtre dans une
société en questionnements parfois contradictoires et pas toujours cohérents.
Les jeunes acteurs doivent percevoir cette insécurité dont le jeu de l’acteur
doit s’imprégner et en être les témoins.
L’expérience pédagogique a-t-elle eu de l’influence sur vos propres travaux ?
M. D. : Bien sûr, diriger un atelier de formation c’est se mettre soit
même en apprentissage. Face à Barker je suis comme les étudiants de l’EDT, je
cherche à faire « transpirer » la matière poétique et politique de
l’écriture, et je peine, tâtonne et me trompe autant qu’eux. En boutade, je
dirais que je suis en ce moment moi aussi en formation.
Propos recueillis par Catherine Robert